LE MARCHÉ DES CHANGES À L’HEURE DE LA GUERRE COMMERCIALE

Le point macro

Depuis vendredi dernier, les Etats-Unis ont mis en vigueur la hausse de 10 à 25% des droits de douane supplémentaires sur 200 milliards de dollars de biens chinois. Ce nouvel épisode de la guerre commerciale entre les Etats-Unis et la Chine a eu des retombées immédiates sur le marché des devises. Dans la foulée, le yuan, dont le taux de change reste contrôlé par Pékin, a atteint un point bas de quatre mois face à l’USD. Même si la Chine le dément officiellement, elle semble tentée d’utiliser le taux de change pour contrer l’administration Trump. On note également un renforcement notable du yen du fait de son statut de valeur refuge. En parallèle, contrairement à ce qui s’est passé ces derniers mois, le dollar index ne profite pas du regain des tensions. L’explication est simple : le marché considère que si la guerre commerciale perdure, cela va négativement impacter l’économie américaine et obliger la Réserve Fédérale à soutenir l’économie, ce qui pourrait conduire à un rendement plus faible du dollar. D’ailleurs, la probabilité d’une baisse des taux aux Etats-Unis d’ici à janvier 2020 est désormais estimée à 66% selon le marché. A court terme, ces attentes concernant la politique monétaire américaine pourraient parasiter l’évolution du dollar index. Il faudra surveiller de près le support hebdomadaire à 97,15, qui correspond quasiment au niveau de la moyenne mobile à 55 jours, afin de savoir si la baisse va se prolonger.

L’euro a affiché l’une des meilleures performances de la semaine passée face à la livre sterling, avec un gain de plus de 1,30% malgré la solide hausse du PIB britannique au premier trimestre. Au premier abord, la progression de 1,8% sur un an (contre 1,1% pour la France à titre de comparaison) pourrait confirmer que le Brexit a peu d’effets négatifs sur l’économie britannique, voire constitue plutôt une opportunité. Ce serait cependant avoir une lecture erronée des chiffres. La progression forte de la croissance s’explique surtout par la hausse de l’investissement des entreprises et des stocks en préparation de la date de sortie initiale de l’UE, fixée à fin mars, qui depuis a été repoussée à fin octobre. Les chefs d’entreprises, ne sachant pas quelles seront les difficultés liées à la sortie, ont investi massivement et accumulé des stocks juste au cas où. Le marché des changes ne s’y est pas trompé, ce bon chiffre du PIB n’est en fait pas une bonne nouvelle.

Face au dollar, l’euro affiche une progression honorable de 0,50% sur la semaine écoulée mais, objectivement, il n’y a pas grand-chose qui se soit passé. La monnaie unique a affiché une résilience certaine face au retour des tensions commerciales entre les Etats-Unis et la Chine. Ces tensions constituent plutôt un point positif pour l’Europe car elles évitent que Washington ne se penche sur le sujet conflictuel de la balance commerciale allemande. En ce qui concerne le taux de change, l’euro a joué au yoyo dans une borne très étroite comprise entre 1,1175 et 1,1217 au cours des dernières séances. Nous restons dans un marché très attentiste à court terme.

Le point technique

Nous sommes dans un univers de volatilité faible, particulièrement pour les paires en EUR. Sur les trente principales paires échangées au niveau mondial, seules cinq ont affiché au cours des séances récentes une volatilité excédant la moyenne des dernières semaines. Il s’agit de l’AUD/JPY, du CAD/JPY, de l’EUR/JPY, du NZD/JPY et de l’USD/JPY. On notera que toutes ces paires ont pour dénominateur commun le yen japonais qui a connu une évolution haussière importante à cause de l’aversion au risque liée à la guerre commerciale. Sur les semaines à venir, le yen pourrait être le bon baromètre du marché pour juger des difficultés des négociations commerciales entre Washington et Pékin.

Les supports et résistances affichés ci-dessous indiquent respectivement les points bas et hauts au sein desquels les cours devraient évoluer dans le courant de la semaine.

 SUPPORTSHEBDORÉSISTANCES HEBDO
S2S1R1R2
EUR/USD1,10711,11361,12671,1331
EUR/GBP 0,83960,84490,86040,8705
EUR/CHF 1,12231,13101,14361,1484
EUR/CAD 1,49191,49771,51021,5169
EUR/JPY 121,50122,75125,05125,62

Par conséquent, à court terme, le terrain de jeu pour l’EUR/JPY risque d’être intéressant. Sur les cinq dernières séances, la baisse est de l’ordre de 1%. La paire a cassé avec succès le solide support situé à 123,70 la semaine passée et devrait donc, en toute logique, poursuivre sur sa tendance baissière à moins d’un retournement de situation sur le front de la guerre commerciale. La prochaine zone à risque pour la paire est à 122,75 avant le niveau de 121,50 qui est le point bas de 2019.

Pour ce qui est de l’EUR/USD, c’est l’inverse, il n’y a pas grand-chose à surveiller dans l’immédiat. La paire devrait encore rester autour de 1,12 même si la tendance à moyen terme reste toujours baissière avec une première zone de support importante à 1,1136.

Les annonces à suivre

La semaine qui débute sera sûrement encore dominée par la guerre commerciale. Même si la possibilité d’un accord entre les Etats-Unis et la Chine reste supérieure à 50%, les récentes difficultés repoussent à plus tard un tel scénario. La diplomatie des tweets fait son retour. Autrement dit, il va falloir prêter attention aux nombreux tweets du président Trump afin d’essayer d’en savoir plus sur ce qui se passe en coulisses entre Washington et Pékin. Officiellement, les discussions se poursuivent mais, dans les prochains jours, il n’est pas exclu que nous assistions à une escalade verbale voire même à des mesures de représailles plus importantes de la part de la Chine.

Vous trouverez ci-dessous les publications et événements qui devraient avoir un impact majeur sur l’évolution du cours des devises.

JOURHEUREPAYSINDICATEURA QUOI S'ATTENDRE ?
14/0511:00Indicateur du sentiment économique ZEWConfirmation de l’amélioration du climat économique en mai (consensus à 5,0)
15/0504:00Production industrielleRalentissement à 6,5% en avril sur un an après 8,5% le mois précédent
08:00PIB au premier trimestreHausse à 0,4% après une contre-performance à 0% au T4 2018
14:30Ventes au détailRalentissement attendu en avril à 0,7% contre 1,2% précédemment