Une histoire compliquée

Les signaux envoyés par l’économie américaine sont assez déconcertants en ce moment. Le consommateur américain est en bonne santé malgré la hausse fulgurante de l’inflation à des niveaux qui n’ont pas été connus depuis plus de quarante ans. Les ventes au détail ont fortement rebondi en janvier, après un mois de décembre décevant. En variation mensuelle, la hausse est de 3,8%. La dernière fois qu’un tel niveau avait été atteint, c’était lorsque l’administration Trump envoyait des chèques de plusieurs milliers de dollars aux Américains en pleine pandémie. Nous restons toutefois convaincus qu’à un certain stade la consommation va fléchir. L’inflation est durable. Elle va en particulier pénaliser les ménages les moins aisés.

Le chiffre de l’indice des prix à la production en janvier aux Etats-Unis a révélé que les pressions inflationnistes s’accélèrent et qu’elles touchent désormais tous les secteurs d’activité. Aucun n’est épargné. En un seul mois, la hausse moyenne dans les services a atteint 0,7% et celle dans les biens intermédiaires 1,3%. L’augmentation est particulièrement inquiétante au niveau de l’énergie (+2,5%) et de l’alimentation (+1,6%). Dans ces circonstances, il faut s’attendre à ce que le pouvoir d’achat des ménages américains chute dans les mois à venir. Cela surviendra au pire moment pour l’administration Biden qui doit affronter les élections de mi-mandat cet automne.

Le niveau de l’inflation renforce les attentes de durcissement monétaire par la Réserve Fédérale américaine (Fed). Le compte-rendu de la dernière réunion de la banque centrale a mis en avant que plusieurs participants craignent un désancrage des anticipations d’inflation. Si cela devait se produire, la tâche se complexifierait fortement pour la Fed. Elle devra agir très agressivement pour convaincre les opérateurs de marché et les consommateurs qu’elle est en mesure de faire refluer l’inflation. Au moment où nous écrivons, les cambistes anticipent six hausses de taux de 25 points de base chacune d’ici la fin de l’année. Cela porterait le taux directeur de la Fed juste au-dessus de1,60% en décembre. Ces anticipations sont très fluctuantes. Il y a encore quelques jours de cela, le consensus tablait sur sept hausses des taux. Le message est clair en tout cas : l’ère des taux bas est terminée.

En zone euro, l’inflation est toujours un sujet mais c’est le risque géopolitique qui accapare tous les esprits dans l’immédiat. Les tensions entre l’Ukraine et la Russie ont abouti à un très fort regain de volatilité et d’aversion au risque sur les marchés financiers (les actions en particulier). En revanche, l’impact est jusqu’à présent limité sur le marché des changes. L’EUR/USD reste dans un range de 140 points sur les dernières séances. Le franc suisse, qui est pourtant une valeur privilégiée en phase de risque géopolitique, a gagné très peu de terrain face à l’euro la semaine dernière. Les cambistes ne semblent pas croire à une détérioration importante de la situation (exemple : un conflit ouvert).

Enfin, le processus de durcissement monétaire se poursuit dans les pays émergents. La banque centrale de Russie a relevé pour la huitième fois consécutive son taux directeur, à 9,50%. Ce n’est qu’un début. D’autres hausses de taux sont à venir. La Russie est l’un des pays qui a adopté l’approche la plus agressive pour combattre les pressions inflationnistes. Le seul pays qui semble résolu à faire bande à part est la Turquie. La semaine dernière, la banque centrale, qui est contrôlée de facto par le gouvernement, a maintenu son taux directeur inchangé à 14%. C’est élevé mais c’est encore trop bas pour avoir un réel effet sur la dynamique d’inflation. L’indice des prix à la consommation atteint 50% sur un an en janvier dernier. On peut parler d’hyperinflation à ce stade.

Sur le marché des changes, les grandes bornes des dernières semaines demeurent. La volatilité est contenue pour le moment. Pour certaines paires, les niveaux techniques sont presque inchangés (par exemple pour l’EURGBP). A court terme, nous pensons que l’EUR/USD devrait continuer d’évoluer dans un grand range, compris entre 1,13 et 1,15 comme c’est le cas depuis le début du mois. La volatilité va vraiment faire son retour à l’occasion des réunions des banques centrales au mois de mars qui vont permettre de donner une direction plus claire concernant la politique monétaire cette année.

Les supports et résistances affichés ci-dessous indiquent respectivement les points bas et hauts au sein desquels les cours devraient évoluer dans le courant de la semaine.

 SUPPORTSHEBDORÉSISTANCES HEBDO
S2S1R1R2
EUR/USD1,11171,12331,15801,1668
EUR/GBP 0,82240,82820,84290,8498
EUR/CHF 1,02581,03721,05331,0597
EUR/CAD 1,41731,43031,45611,4691
EUR/JPY 127,01129,08131,86132,81

+33 (0)1 48 09 09 83

Outre le risque géopolitique qu’il faudra continuer à surveiller de près cette semaine, l’attention des cambistes va se porter sur la première estimation des PMI pour le secteur manufacturier en zone euro en février (aujourd’hui) et sur le climat des affaires en Allemagne en février (mardi). Il ne s’agit pas de market movers, c’est-à-dire d’évènements de marché susceptibles de provoquer un regain de volatilité sur les devises. Toutefois, ils permettront d’avoir un meilleur panorama de l’économie européenne et surtout de l’économie allemande qui avait montré des signes de faiblesse en fin d’année 2021.

Vous trouverez ci-dessous les publications et événements qui devraient avoir un impact majeur sur l’évolution du cours des devises.

JOURHEUREPAYSINDICATEURA QUOI S'ATTENDRE ?
21/0209:30Première estimation du PMI manufacturier (Février)Baisse attendue à 57,0 contre 59,8 en janvier.
22/0210:00Indice IFO du climat des affaires (Février)Consensus à 94,7 contre 95,7 en janvier.
16:00Confiance des consommateurs du Conference Board (Février)Baisse prévue à 110,3 contre 113,8 en janvier.
24/0214:30Nouvelle estimation du PIB au quatrième trimestre 2021Le consensus table sur une progression à 7,0% en variation trimestrielle.

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