C’est fait. La BCE a abaissé son taux directeur de 25 points de base. Dans un monde idéal, elle aurait diminué le loyer de l’argent de 50 points de base. Cela aurait un peu aidé la consommation intérieure. Surtout, cela aurait constitué une bouffée d’air frais pour l’immobilier commercial. Il va falloir se contenter de la stagnation économique.
C’était attendu. La Banque Centrale Européenne (BCE) a abaissé son taux directeur principal de 25 points de base jeudi dernier. La porte est ouverte à de futures baisses de taux. Nous pensons qu’elle va continuer le processus d’assouplissement au même rythme au moins jusqu’au printemps prochain. Pourtant, il aurait fallu aller beaucoup plus vite. Alors que l’économie allemande est en récession, que le secteur manufacturier s’effondre, et que le coût de l’énergie est quatre fois supérieur en zone euro à celui des États-Unis, la BCE continue de s’inquiéter d’une éventuelle boucle prix-salaire dans les services que plus aucun économiste ne perçoit. En février dernier, il y avait quelques statistiques qui pouvaient laisser à penser que l’inflation salariale peut constituer un problème. Aujourd’hui, ce n’est plus du tout le cas. On peut même penser que le déclin de l’indice des prix à la consommation depuis plusieurs mois traduit surtout une demande qui est comprimée. Comme ce fut le cas par le passé, le risque est élevé que la BCE soit en retard par rapport au cycle économique. Cela ne veut pas dire qu’une récession soit à nos portes. Ce n’est pas notre scénario central. En revanche, la poursuite de la stagnation économique dans laquelle nous sommes empêtrés depuis des années semble inévitable.
Mais il y a pire. En refusant de baisser plus fortement le loyer de l’argent comme la Réserve Fédérale américaine (Fed) l’a fait en septembre, la BCE prend également le risque d’un accident sur le segment de l’immobilier commercial qui est en crise depuis la Covid. Récemment, la banque centrale a conduit une enquête auprès des principales banques de la zone euro pour connaître l’exposition de leur bilan à l’immobilier commercial et savoir si les actifs en question sont valorisés à un prix en ligne avec ceux du marché. Le moins qu’on puisse dire – en restant politiquement correct – c’est que le grand ménage reste à faire.
On sait que l’immobilier est l’un des secteurs économiques les plus sensibles à la baisse des taux. Par exemple, les prêts dans l’immobilier résidentiel en France ont fortement diminué depuis juin, pour atteindre en moyenne 3,20% sur vingt ans. Une baisse de 50 points de base la semaine dernière aurait permis d’apporter une bouffée d’air frais importante et rapide à l’immobilier commercial qui est, selon nous, le principal risque systémique pesant sur la zone euro en ce moment. C’est un risque bien plus important que la dette des États. Pourquoi ? Car ce risque est mal évalué dans le bilan des banques. C’était le même sujet, souvenez-vous, lors de la crise des subprimes. Les prêts immobiliers américains étaient, à l’époque, mal valorisés dans les books des banques, ce qui a conduit à des pertes importantes, à une crise de liquidité sur les marchés etc…Le reste est connu de tous.
Nous ne disons pas qu’une crise systémique liée à l’immobilier commercial soit imminente. Nous n’en savons rien. Néanmoins, il est évident qu’à force d’être trop prudente, de se concentrer sur des indicateurs en retard par rapport au cycle, la BCE prend de mauvaises décisions de politique monétaire. Dans le meilleur des cas, cela va nous coûter des points de croissance. Dans le pire des cas, cela pourrait précipiter une crise.
Le point technique
Sur le marché des changes, la baisse des taux en zone euro constitue un autre argument pour se positionner à la vente sur l’EUR/USD. Nous réitérons notre cible à court terme à 1,08. Notons que les positions vendeuses détenues sur le dollar américain ont continué à diminuer au cours de la semaine dernière, selon le rapport Commitment of Traders* de la CFTC (que nous regardons chaque semaine). Nous restons convaincus que le dollar fort va rester la norme en 2025. Mais il faut s’attendre à un regain de volatilité habituel autour de la présidentielle américaine. Le marché commence juste à intégrer le risque d’une présidence Trump (forte baisse du peso mexicain, par exemple).
Les supports et résistances affichés ci-dessous indiquent respectivement les points bas et hauts au sein desquels les cours devraient évoluer dans le courant de la semaine.
Supports | hebdo | Résistances | hebdo | |
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S2 | S1 | R1 | R2 | |
EUR/USD | 1,0788 | 1,0800 | 1,1015 | 1,1090 |
EUR/GBP | 0,8274 | 0,8310 | 0,8414 | 0,8488 |
EUR/CHF | 0,9284 | 0,9310 | 0,9410 | 0,9488 |
EUR/CAD | 1,4798 | 1,4823 | 1,5122 | 1,5190 |
EUR/JPY | 159,14 | 159,98 | 163,11 | 163,45 |
Les annonces à suivre
C’est au tour de la Banque du Canada d’être sous les projecteurs cette semaine. Les derniers bons chiffres de l’emploi au Canada plaident en faveur d’une baisse de 25 points de base – nul besoin de se précipiter. Toutefois, une minorité d’économistes s’attend à une baisse plus importante de 50 points de base. Cela nous paraît improbable. L’impact sur le CAD devrait rester minimal. La paire EUR/CAD reste dans une tendance de fond haussière. On notera que la corrélation positive entre le dollar canadien et le pétrole ne fonctionne pas. Malgré la hausse de l’or noir dans la foulée des tensions au Moyen-Orient, le CAD est toujours en berne.
Les indicateurs d’activité PMI devraient, de leur côté, confirmer la bonne santé de l’économie américaine. Le secteur des services est résilient, soutenu par la consommation, tandis que le secteur manufacturier est en contraction du fait d’une mauvaise dynamique mondiale. Mais pas de raison de paniquer.
Enfin, l’indice IFO du climat des affaires en Allemagne ne devrait réserver aucune surprise. L’économie allemande devrait être en récession sur l’année 2024 et probablement l’année prochaine. C’est un problème pour l’EUR/USD à long terme (surperformance de l’économie américaine face à l’atonie économique en zone euro).
Vous trouverez ci-dessous les publications et événements qui devraient avoir un impact majeur sur l’évolution du cours des devises.
Jour | Heure | Pays | Indicateur | À quoi s'attendre ? |
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Le 23/10/2024 | 15:45 | CAN | Réunion de la banque centrale | Taux directeur précédent à 4,25%. |
Le 24/10/2024 | 15:45 | USA | PMI manufacturier (Octobre) | Précédent à 47,3 (en contraction). |
Le 25/10/2024 | 10:00 | ALL | Indice IFO du climat des affaires (Octobre) | Précédent à 85,4. |
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