Le consensus de marché est très négatif à l’égard du dollar américain. Nous n’avons pas connu un tel niveau de défiance depuis plusieurs décennies. Certains y voient un signal contrariant annonçant un prochain rebond. Ce n’est certainement pas aussi simple. Tant qu’il y aura des incertitudes à propos de la politique commerciale américaine, le dollar devrait souffrir.
Beaucoup a été dit sur le conflit militaire au Moyen-Orient et son impact sur les marchés financiers, y compris le Forex. Beaucoup de choses sont faussent. Un seul exemple : le yen japonais est la meilleure couverture contre l’essor du risque géopolitique a pu-t-on lire de la part d’une grande banque d’investissement nordique. C’est souvent le cas. Mais pas toujours. Dans le cas présent, la devise japonaise a continué sa dépréciation de longue date face à l’euro. Comment expliquer cela ? Le conflit militaire en cours, aussi tragique soit-il, devrait entraîner des répercussions essentiellement régionales. En outre, les cambistes sont sceptiques sur l’hypothèse d’une prochaine hausse des taux par la Banque du Japon qui a été reportée à plusieurs reprises cette année. Cela a aussi pu pénaliser la devise nippone.
Prenons du recul. L’étude de référence de Guidolin et La Ferrara, publiée en 2010, analyse 28 conflits internationaux et leur impact sur l’indice boursier MSCI World (qui est le plus large possible). C’est sans appel. Deux ont provoqué une réaction négative importante des actions tandis que trois, dont la guerre en Irak en 2003, ont entraîné une hausse des actions. Dans une large majorité des cas, les conflits militaires ont eu un effet proche de zéro sur les actions. Ce sont des non-évènements, largement commentés, mais sans conséquences durables sur les bourses.
Le même constat s’applique pour le marché des changes. Le risque géopolitique peut provoquer des sursauts soudains et éphémères de cours – habituellement au profit des valeurs refuge (dollar américain, franc suisse, yen japonais). Mais ce n’est pas systématiquement le cas. Même les devises qui sont directement concernées par le conflit peuvent résister plutôt bien. En témoigne le shekel israélien qui est en recul de seulement -1,20 % sur la semaine écoulée. Au regard de la situation sur le terrain, c’est peu. On pourrait aussi penser que le dollar canadien, en raison de sa corrélation étroite avec le prix du baril de pétrole, aurait bénéficié de l’envolée de l’énergie. Patatras, la paire EUR/CAD est en hausse de +0,62 % sur les cinq dernières séances.
La morale de tout cela, c’est qu’il faut se méfier des simplifications qu’on entend souvent ici et là. Pour une entreprise qui cherche à couvrir son risque de change sans être exposée directement au(x) pays en tension, le risque géopolitique n’est probablement pas le premier facteur à prendre en compte. La politique monétaire, les flux de capitaux, l’évolution de la balance commerciale sont bien plus importants car ils ont des effets souvent durables. Rappelez-vous par exemple que la forte hausse de l’euro au premier trimestre était essentiellement liée à des flux de capitaux entrants en zone euro afin d’investir sur les actions européennes décotées. Les montants étaient tellement conséquents que cela a structurellement soutenu le taux de change de la monnaie unique pendant plusieurs mois consécutifs.
Le point technique
Sur le marché des changes, la défiance à l’égard du dollar est toujours anormalement élevée. Les gestionnaires d’actifs n’ont jamais été aussi négatifs à l’égard du billet vert depuis vingt ans, selon les données du régulateur américain. En France, beaucoup de banques d’investissements tablent désormais sur une paire EUR/USD à 1,20, voire au-delà. Ce n’est pas aberrant. Enfin, c’est la 16ème fois depuis 1973 que le Dollar Index (qui mesure l’évolution du dollar face aux monnaies des principaux partenaires commerciaux) chute de plus de 10% en l’espace de cinq mois. Par le passé, cela avait conduit à un fort rebond. Est-ce que cela va se produire cette fois-ci ? Pas certain. En tout cas, probablement pas tout de suite. Il y a encore beaucoup trop d’incertitudes à propos de la politique commerciale américaine, de rumeurs de dévaluation unilatérale du billet vert. Nous anticipons toujours une baisse de -7 % du Dollar Index d’ici la fin de l’année.
Attention, la dépréciation du dollar n’a pas lieu face à toutes les monnaies. Ainsi, le dong vietnamien a atteint la semaine passée un nouveau point bas historique face à la devise américaine.
Les supports et résistances affichés ci-dessous indiquent respectivement les points bas et hauts au sein desquels les cours devraient évoluer dans le courant de la semaine.
Supports | hebdo | Résistances | hebdo | |
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S2 | S1 | R1 | R2 | |
EUR/USD | 1,1290 | 1,1380 | 1,1600 | 1,1701 |
EUR/GBP | 0,8311 | 0,8399 | 0,8588 | 0,8590 |
EUR/CHF | 0,9240 | 0,9300 | 0,9434 | 0,9511 |
EUR/CAD | 1,5434 | 1,5588 | 1,5812 | 1,5888 |
EUR/JPY | 163,90 | 164,99 | 166,90 | 167,11 |
Les annonces à suivre
L’agenda est essentiellement américain cette semaine avec notamment la confiance du consommateur pour le mois de juin qui devrait rester bien orientée. Quant à l’inflation, la Réserve Fédérale, qui a maintenu ses taux inchangés la semaine dernière, devrait regarder de près l’indice PCE core pour mai. Il devrait continuer de refluer, ce qui confirme qu’il n’est pas nécessaire de bouger les taux dans l’immédiat. Globalement, contrairement aux craintes énoncées en avril dans la foulée du « Jour de la Libération », l’économie américaine est plutôt en bonne forme.
Vous trouverez ci-dessous les publications et événements qui devraient avoir un impact majeur sur l’évolution du cours des devises.
Jour | Heure | Pays | Indicateur | À quoi s'attendre ? |
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Le 23/06/2025 | 15:45 | USA | PMI manufacturier (Juin) | Estimation précédente à 52,0. |
Le 24/06/2025 | 16:00 | USA | Confiance du consommateur du Conference Board (Juin) | Précédent à 87,5. |
Le 27/06/2025 | 14:30 | USA | Indice PCE core (Mai) | Précédent à 2,5% sur un an. |
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