La politique est sur le devant de la scène, notamment en raison des turpitudes françaises. Pour autant, les grandes tendances du marché des changes sont inchangées. L’euro bénéficie toujours des faveurs des cambistes. Le consensus table sur une poursuite de la hausse de l’EUR/USD en direction de 1,25 l’an prochain. Il faudra au préalable franchir le cap des 1,18-1,19 qui fait office de résistance majeure.
L’instabilité politique en France n’a pas d’effet notable et durable sur le marché des changes. Lundi dernier, dans la foulée de la démission surprise du Premier ministre Sébastien Lecornu, l’euro/dollar a à peine chuter. C’est normal. Tant qu’il n’y a pas de crise de la dette et de contagion aux autres pays de l’Union, l’euro ne réagira qu’à la marge aux turpitudes politiques françaises. Le marché considère, à juste titre, que ce qui se passe dans notre pays est un cas à part.
Selon nous, le problème pour la France n’est pas tant financier qu’économique.
L’incertitude politique intervient au pire moment. Au deuxième trimestre, la croissance française a atteint seulement +0,3%. Le gouvernement Bayrou anticipait une croissance à +0,7% cette année. C’est optimiste. Le consensus des économistes table sur +0,5%. Ce sera certainement plus bas compte tenu de l’effet négatif sur le moral des chefs d’entreprise et des ménages des événements récents. Dans tous les cas, c’est un échec comparé à l’an dernier lorsque la croissance était à +1,1%. Et même à ce moment-là, il n’y avait aucune raison d’être satisfait.
Tous les moteurs de la croissance française sont en panne : la demande intérieure est quasi nulle, les perspectives d’embauche et d’investissement sont en berne, les hausses de salaire faibles et le commerce extérieur est en chute libre à cause du regain de protectionnisme et du manque de compétitivité de nombreux pans de notre économie. Ajoutons à cela la hausse de l’euro qui commence sérieusement à pénaliser nos PMEs exportatrices (celles qui ont opté pour une couverture de taux de change l’an dernier tablaient sur une paire EUR/USD à 1,15 pour la cible la plus haute). Une nouvelle dose d’instabilité politique n’aide évidemment pas.
La hausse du coût d’emprunt de la France est normale. Et cela va continuer sans toutefois que ça n’atteigne des niveaux de crise. La Banque Centrale Européenne (BCE) veille au grain et interviendra pour éviter cela. En revanche, cela va pénaliser l’activité économique. Moins de richesse créée, plus de prélèvements obligatoires pour maintenir notre train de vie. La moitié de la hausse de la dette publique depuis 2017 est liée aux retraites – et non pas, comme on le croit à tort, aux mesures de soutien liées à la crise sanitaire. Tôt ou tard, il faudra s’attaquer à ce chantier si délicat politiquement.
La France est, malheureusement, dans les pays les plus en difficulté. Mais soyons objectifs, c’est toute l’Europe qui est à la traîne. L’Allemagne devrait connaître sa quatrième année de stagnation économique en dépit du plan de relance massif annoncé en début d’année. La Belgique est dans une situation assez proche de celle de la France, notamment en raison d’un endettement difficile à endiguer. Certes, l’Espagne tire son épingle du jeu avec une croissance qui pourrait atteindre +2,8% en 2025 et une production industrielle à +3,4% sur un an selon les chiffres publiés la semaine dernière. Cela donne envie. Mais pour y arriver, ce fut douloureux. Il a fallu regagner des marges de manœuvre budgétaire et passer par l’austérité et des baisses de salaire réel pendant plusieurs années à partir de 2010-2012. Personne n’est prêt à cela en France.
Plus inquiétant, les grandes entreprises européennes ne jouent plus dans la cour des grands. En 1980, l’Europe comptait 4 entreprises dans le top 25 des plus grandes capitalisations mondiales, contre 21 pour les États-Unis. En 2025, l’Europe n’en compte plus aucune, tandis que les États-Unis en ont 22. L’Europe a complètement raté le virage des nouvelles technologies qui a commencé à partir de 2010.
Difficile, dans ces conditions, de croire à une renaissance économique européenne. C’était le thème de ce début d’année sur les marchés financiers lorsque tout le monde paniquait à propos de Donald Trump et espérait une solution rapide à la guerre en Ukraine. Il semble que ce soit plus un vœu pieux qu’une réalité, pour le moment.
Le point technique
Ce n’est pas nécessairement un problème pour la monnaie unique puisqu’on sait que la dynamique de croissance est loin d’être un facteur déterminant dans l’évolution des taux de change. Depuis plusieurs semaines, l’EUR/USD a amorcé une phase de consolidation dans un marché calme marqué par très peu de statistiques (seule la production industrielle allemande a été publiée la semaine dernière, sans impact sur le marché évidemment). Tant que la paire reste au-dessus de 1,15, la tendance haussière est intacte. Le consensus prévoit que l’EUR/USD pourrait atteindre 1,25 l’an prochain. Cela nous paraît crédible.
La semaine dernière a surtout été marquée par l’envolée de l’EUR/JPY. La paire a atteint un nouveau record historique à 177,90 – ce qui représente une progression de 10% en six mois. Nous voyons mal ce qui pourrait arrêter le mouvement haussier (à moins d’une hausse des taux par la Banque du Japon mais qui ne paraît pas imminente). Il n’est pas impossible que la paire atteigne le seuil des 180,00 d’ici la fin de l’année.
Les supports et résistances affichés ci-dessous indiquent respectivement les points bas et hauts au sein desquels les cours devraient évoluer dans le courant de la semaine.
Supports | hebdo | Résistances | hebdo | |
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S2 | S1 | R1 | R2 | |
EUR/USD | 1,1550 | 1,1500 | 1,1732 | 1,1809 |
EUR/GBP | 0,8577 | 0,8589 | 0,8710 | 0,8790 |
EUR/CHF | 0,9239 | 0,9270 | 0,9390 | 0,9421 |
EUR/CAD | 1,6140 | 1,6190 | 1,6302 | 1,6333 |
EUR/JPY | 174,89 | 175,90 | 178,10 | 179,22 |
Les annonces à suivre
Cette semaine va être encore assez calme sur le front économique.
Selon les anticipations du marché des changes, la probabilité que la Réserve Fédérale américaine (Fed) abaisse son taux directeur de -25 points de base en octobre est proche de 96%. C’est donc acquis. Les éventuelles statistiques qui vont tomber d’ici la prochaine réunion du FOMC ne vont pas changer la donne. En revanche, il faudra être vigilant concernant les chiffres du mois de novembre car l’issue de la réunion de décembre du FOMC est loin d’être évidente. Certains au sein de l’organisme décisionnel de la Fed considèrent qu’il faut aller plus vite dans la baisse des taux (comme Stephen Miran, qui a été nommé par le président Donald Trump). D’autres pointent plutôt du doigt les risques inflationnistes qui pourraient se matérialiser ce trimestre, résultant des taxes douanières, et invitent à faire preuve de patience. Il faut donc être prudent.
Vous trouverez ci-dessous les publications et événements qui devraient avoir un impact majeur sur l’évolution du cours des devises.
Jour | Heure | Pays | Indicateur | À quoi s'attendre ? |
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Le 15/10/2025 | 14:30 | USA | Inflation (Septembre) | Précédent à 2,9% sur un an. |
Le 16/10/2025 | 14:30 | USA | Indice manufacturier de la Fed de Philadelphie (Octobre) | Précédent à 23,2. |
Le 16/10/2025 | 14:30 | USA | Prix à la production (Septembre) | Précédent à -0,1% sur un mois. |
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