Attentisme

Volatilité forte en Asie. Plusieurs monnaies asiatiques se sont nettement appréciées ces derniers jours face au dollar américain dans l’anticipation que les accords commerciaux négociés entre Washington et la région incluent un engagement à augmenter le taux de change des devises locales.

Pour ceux qui espéraient un peu de visibilité concernant la politique monétaire de la Fed, vous avez certainement été déçus. Rendez-vous au mois de juin pour en savoir plus !

Ceux qui espéraient que la Réserve Fédérale américaine (Fed) trace une voie claire pour les prochains mois ont été déçus. La banque centrale reste dans une position attentiste qui s’explique essentiellement par la difficulté à obtenir des prévisions fiables (ce qui ne veut pas dire véridiques). Le contexte de guerre tarifaire n’aide pas.

Prenons l’inflation liée aux taxes douanières. Évidemment, elle va se diffuser dans l’économie, mais ce ne sera pas linéaire. La baisse de l’activité économique va entraîner automatiquement une baisse des pressions inflationnistes. Lorsque ce sera possible, le consommateur américain va se replier sur des substituts locaux, y compris dans les services. En outre, il faut compter avec les effets non anticipés du protectionnisme. Ils sont déjà apparents. On observe en avril une baisse du prix des billets d’avion (-5,2% sur un an), des chambres d’hôtels (-3,7%) et de l’essence (-9,8%). C’est lié à l’effondrement du tourisme étranger aux États-Unis. Cela devrait s’intensifier cet été. Enfin, il faut prendre en considération la baisse des loyers qui se poursuit et tend à réduire les pressions inflationnistes. Bref, il est difficile de dire que le protectionnisme rime systématiquement avec un regain brutal de l’inflation. C’est justement ce qui complique la tâche de la Fed.

Pour l’instant, le marché monétaire anticipe toujours une baisse des taux de 25 points de base en juin. Ce n’est en rien garanti. Il faudra certainement encore trois à quatre mois avant d’être en mesure d’estimer avec plus de certitude l’impact réel des taxes douanières déjà mises en œuvre, et de celles qui pourraient l’être une fois que le moratoire de 90 jours aura expiré au début du mois de juillet. La Fed a donc tout intérêt à prendre son temps et à opérer une baisse du loyer de l’argent au plus tôt en juillet. Seule une hausse importante du taux de chômage d’ici l’été, autour de 4,5%, pourrait l’inciter à accélérer la baisse des taux. Nous en sommes loin puisque le taux de chômage est à 4,0% et les créations d’emplois sont solides, comme l’a révélé le dernier rapport mensuel du Département du Travail.

En Suisse, le retour des taux négatifs (qui étaient présentés comme une anomalie financière n’ayant pas vocation à se reproduire) est quasi-certain. L’inflation dans la Confédération helvétique a atteint 0% en raison d’une baisse du coût du pétrole, des biens importés et d’une inflation au niveau domestique faible. Si on exclut les loyers, l’indice des prix à la consommation est même négatif à -0,7% sur un an en avril. Dans ces circonstances, la Banque Nationale Suisse devrait porter son taux directeur en négatif rapidement. Sa prochaine réunion est prévue en juin. Initialement, le consensus s’attendait à ce qu’elle baisse son taux de 25 points de base. Elle pourrait être tentée de frapper plus fort, avec une baisse de 50 points de base. Pour l’instant, malgré la perspective d’un loyer de l’argent plus faible, le franc suisse reste fort en raison du contexte géopolitique troublé (taxes douanières américaines, désagrégation de la Bosnie, fortes tensions entre l’Inde et le Pakistan, troubles au Moyen-Orient etc.). Ça ne devrait pas changer de sitôt.

Enfin, sans surprise, la Banque d’Angleterre (BoE) a abaissé son taux directeur de 25 points de base. C’était attendu par les cambistes et donc pricé par le marché. En raison de la baisse des pressions inflationnistes et du ralentissement économique à l’œuvre, nous anticipons que la banque centrale anglaise effectue une baisse de taux de 25 points de base tous les trimestres au moins jusqu’à la fin de l’année. Cela devrait exercer peu d’influence sur le cours de la livre sterling. À l’inverse de la Fed, la politique monétaire britannique est plutôt lisible. C’est la bonne nouvelle de la semaine.

Le point technique

Sur le marché des changes, l’EUR/USD est plutôt stable. Du point de vue de l’analyse technique, la tendance de fond est toujours haussière même si à court terme le dollar américain a été un peu soutenu par le rebond des actions américaines – c’est ce qu’on a constaté la semaine dernière.

Notre attention a été surtout attirée par l’Asie. Plusieurs monnaies de la région, en particulier le dollar de Taïwan, ont connu un regain de volatilité soudain au cours des dernières séances. Comment expliquer cela ? Les investisseurs considèrent que les accords commerciaux qui sont en train d’être négociés entre les États-Unis et les pays asiatiques vont inclure une clause prévoyant une appréciation des devises locales par rapport au billet vert. C’est logique sur le papier – le dollar américain est très nettement survalorisé. Mais ce n’est pas certain dans les faits. Si vous êtes exposés aux devises asiatiques, pensez à ajuster votre couverture de change.

Les supports et résistances affichés ci-dessous indiquent respectivement les points bas et hauts au sein desquels les cours devraient évoluer dans le courant de la semaine.

 SupportshebdoRésistanceshebdo
S2S1R1R2
EUR/USD1,11111,12001,14141,1500
EUR/GBP 0,83120,83800,86000,8612
EUR/CHF 0,91990,92800,93880,9410
EUR/CAD 1,54241,54901,57011,5714
EUR/JPY 160,90162,89164,13164,50

Les annonces à suivre

Cette semaine, l’actualité économique est essentiellement américaine. Les chiffres de l’inflation (prix à la consommation et prix à la production) seront d’une importance cruciale car ils permettront de juger de l’évolution de l’inflation dans le contexte de la guerre commerciale. Ce sera précieux pour la Fed. Il faudra également surveiller l’indice manufacturier de la Fed de Philadelphie. C’est d’habitude un indicateur mineur avec peu d’influence sur le marché. Mais la Fed a récemment publié une étude démontrant que c’est une statistique qui permet de déceler avec rapidité les retournements du cycle. C’est très utile pour savoir si l’économie américaine se dirige vers une récession ou un ralentissement économique (c’est notre scénario).

Vous trouverez ci-dessous les publications et événements qui devraient avoir un impact majeur sur l’évolution du cours des devises.

JourHeurePaysIndicateurÀ quoi s'attendre ?
Le 13/05/202514:30USAPrix à la consommation (Avril)Précédent à 2,4% sur un an.
Le 15/05/202514:30USAIndice manufacturier de la Fed de Philadelphie (Mai)Précédent à -26,4.
Le 15/05/202514:30USAPrix à la production (Avril)Précédent à -0,4% sur un mois

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