Questionnement budgétaire

L’envolée des taux obligataires depuis plusieurs séances, à cause du renouvellement des inquiétudes à propos de la dette publique, n’a qu’un effet faible sur les devises, pour le moment. Mais il faut être vigilant. Le dollar semble un peu se reprendre. Il n’est toutefois pas à l’abri d’un nouvel esclandre du président américain Donald Trump.

Chaque semaine apporte son lot de surprises. Au cours des dernières séances, c’est l’envolée des taux de rendement obligataire qui a provoqué quelques sueurs froides. Des émissions d’obligations souveraines à long terme du Japon (30 et 40 ans) se sont mal déroulées – demande inhabituellement faible. En outre, les taux américains continuent d’augmenter. Le taux souverain à 10 ans – qui est le baromètre du marché obligataire – n’est plus très loin de la zone de sensibilité à 5%. Dernier point d’attention, la liquidité est anormalement faible, y compris sur la dette française. C’est le signe que les acheteurs habituels (surtout des institutionnels comme les banques et les compagnies d’assurance) se tiennent à l’écart.

Pourquoi ? Comme c’est le cas assez régulièrement, les interrogations concernant la soutenabilité de la dette publique ressurgissent. Il n’y a rien de très nouveau. C’est la période des discussions budgétaires dans plusieurs pays développés. Faut-il s’inquiéter ? L’envolée des taux est probablement de courte durée. En revanche, cela pourrait mettre la pression sur les États les plus endettés pour qu’ils fournissent des efforts budgétaires. On pensera évidemment à la France qui doit annoncer un nouveau plan de redressement des finances publiques sur un temps record d’ici le mois de juillet. S’il n’y a pas de baisse de dépenses sociales (c’est le principal poste de dépenses !), on peut redouter que les objectifs qui vont être annoncés ne seront pas atteints.

La corrélation entre le marché obligataire et les devises est loin d’être parfaite. Une hausse des taux se traduit généralement par un renforcement du dollar américain et des autres valeurs refuge, mais dans des proportions limitées.

Au niveau économique, il y a du bon et du mauvais. La bonne nouvelle, c’est la résilience du consommateur américain selon la dernière publication du Conference Board. Tôt ou tard, il est probable que la hausse des taxes douanières grignote un peu son pouvoir d’achat. Mais on est loin du scénario catastrophe énoncé par certains au début du mois d’avril dans la foulée du « Jour de la Libération » (récession, voire instabilité financière).

Au niveau des mauvaises nouvelles, la publication des comptes annuels par l’INSEE révèle que l’investissement des entreprises françaises souffre plus que prévu. Au premier trimestre 2025, l’investissement des entreprises est supérieur de seulement 4,4% à son niveau de fin 20219 (juste avant la pandémie). Le consensus tablait sur un chiffre à 6,3%. Ajoutons que les dépenses en capital des entreprises françaises sont toujours en contraction depuis mi-2023 (lent décrochage économique et effet négatif de la dissolution de l’Assemblée nationale l’an dernier). Une éclaircie économique en France nous paraît improbable dans l’immédiat. Il va donc falloir s’habituer à la croissance faible. Au deuxième trimestre, la hausse du PIB devrait être anémique, de 0,1%, comme au premier.

Le point technique

Sur le marché des changes, le dollar américain a repris du poil de la bête, ce qui a permis une stabilisation de la paire EUR/USD autour de 1,13. Le bon indicateur de confiance américain et un apaisement temporaire de la guerre commerciale ont aidé. Toutefois, il en faudra plus pour que le dollar regagne durablement du terrain. Le dollar index, qui permet de mesurer l’évolution du billet vert face aux devises des principaux partenaires commerciaux des États-Unis, est en baisse de 8,1% depuis le début d’année.

Attention si vous êtes exposés au yen japonais. Le dernier rapport hebdomadaire du régulateur américain (le COT, Commitment of Traders) confirme qu’être long sur le yen est le trade du moment. Ce n’est jamais bon quand il y a un tel consensus de marché. Prudence, par conséquent.

Les supports et résistances affichés ci-dessous indiquent respectivement les points bas et hauts au sein desquels les cours devraient évoluer dans le courant de la semaine.

 SupportshebdoRésistanceshebdo
S2S1R1R2
EUR/USD1,11231,12001,13991,1434
EUR/GBP 0,83190,83700,85000,8538
EUR/CHF 0,91900,92470,93990,9430
EUR/CAD 1,54101,55591,57121,5758
EUR/JPY 160,19160,99163,90164,50

Les annonces à suivre

Cette semaine est dense au niveau des statistiques. Le marché monétaire est unanime sur la baisse des taux de la Banque Centrale Européenne (BCE). Elle devrait porter son taux directeur principal à 2%. Mais de nouvelles baisses de taux sont prévues, avec un taux terminal qui pourrait atteindre 1,5% vers mi-2026, selon nous.

Aucun changement en revanche du côté de la Banque du Canada (BoC) qui est en mode pause jusqu’au trimestre précédent.

Il faudra enfin être attentif à l’évolution du chômage américain. Les chiffres du mois d’avril étaient bons : taux de chômage à 4,2%, et créations d’emplois à 177,000. Il est probable que la dynamique soit encore positive en mai. Les licenciements de masse redoutés à cause de la guerre commerciale tardent à se matérialiser. Dans tous les cas, cela ne devrait pas influer sur la politique monétaire américaine, pour le moment. Nous considérons que la Réserve Fédérale (Fed) va opter pour le statu quo en juin et en juillet. En fonction des statistiques de l’été, elle pourrait décider de reprendre le cycle de baisse des taux en septembre. Cela va dépendre principalement de la tournure de l’inflation.

Vous trouverez ci-dessous les publications et événements qui devraient avoir un impact majeur sur l’évolution du cours des devises.

JourHeurePaysIndicateurÀ quoi s'attendre ?
Le 03/06/202511:00EURInflation (Mai)Précédent à 2,2% sur un an.
Le 04/06/202515:45CANRéunion de la banque centraleAucun changement de politique monétaire.
Le 05/06/202514:15EURRéunion de la banque centraleBaisse du taux directeur de 25 points de base à 2%.
Le 06/06/202514:30USATaux de chômage (Mai)Précédent à 4,2%.

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