Remue-ménage en France

Sauf surprise de dernière minute, le vote de confiance devrait conduire à la chute du gouvernement Bayrou. Nous pensons que les effets seront limités sur les actifs en euro (en particulier la devise). Dans le pire des cas, la BCE se réserve le droit d’intervenir.

Il n’y a pas qu’en France que le coût d’emprunt de l’État augmente. C’est le cas dans tous les pays développés. Aux États-Unis, le taux à 30 ans tutoie par exemple le seuil psychologique des 5%. Tout ceci est le signe d’une anxiété croissante des investisseurs à propos de la trajectoire de la dette publique dans les pays développés. Il est rare que les tensions sur le marché obligataire n’entraînent pas des conséquences négatives sur les autres marchés. Mais, pour l’instant, ça tient. Les actions sont en forte hausse. Prenons les actions chinoises, elles sont à un point haut depuis 10 ans. Pas de remous non plus sur le marché des changes. Les principales devises continuent de suivre la même tendance qu’il y a quelques semaines : hausse pour l’euro, baisse pour le dollar américain et le yen. On constate que les investisseurs institutionnels (banques, fonds d’investissement etc.) semblent acheter un peu plus de valeurs refuge que d’habitude – essentiellement de l’or et du franc suisse. On est toutefois loin d’un sentiment de panique.
Comment se profile le reste de l’année du point de vue macroéconomique ? Il est probable que la thématique du protectionnisme et de l’inflation qui en résulte soit derrière nous. L’administration Trump semble se focaliser plutôt sur l’échéance électorale de l’année prochaine. Pour gagner, il faut une économie en bonne santé et une bourse qui augmente. Les relents protectionnistes ne sont pas bons à cet égard. La Réserve Fédérale devrait un peu aider la Maison Blanche en baissant son taux directeur en septembre de -25 points de base. C’est acquis. Cela va permettre de redynamiser la confiance du consommateur américain qui était en berne cet été. Bonne nouvelle, la dévaluation du dollar – qui était redoutée – n’est certainement plus d’actualité. Nous nous attendons seulement à une dépréciation du Dollar Index d’environ -3% d’ici la fin de l’année. C’est peu.
En Europe, la thématique de la renaissance économique a du plomb dans l’aile. Comme on pouvait le craindre, la relance des dépenses en défense bénéficie essentiellement aux entreprises américaines. Quant à la dynamique de croissance, elle reste faible. Selon le Madison Project basé aux Pays-Bas, la part de l’Europe dans la richesse mondiale est à son point bas depuis le Moyen-Âge. Cela fait froid dans le dos.
La bonne surprise en cette rentrée, c’est le retour de la Chine. Les indicateurs qui suivent les flux de crédit dans l’économie montrent que Pékin a ouvert les vannes à grand, ce qui devrait stimuler l’activité. Cela va permettre de soutenir le secteur de l’immobilier – le dégonflement de la bulle va prendre plusieurs années – et les exportations qui sont un peu pénalisées par la guerre commerciale.

Le point technique

Sur le marché des changes, le dollar et la livre sterling sont sous pression. La devise britannique est pénalisée fortement par la hausse des coûts d’emprunt à 30 ans qui sont désormais à leur plus haut niveau depuis 1998. Contrairement à l’euro, la livre sterling est très sensible aux fluctuations du marché obligataire qui devraient perdurer au moins dans les semaines à venir. Cela signifie que la paire EUR/GBP devrait continuer sa progression et potentiellement dépasser la résistance à 0,87. Les problèmes du dollar sont différents. La tentative de reprise en main par la Maison Blanche de la politique monétaire américaine n’est pas du goût de tout le monde et incite les investisseurs à se positionner à la vente sur le billet vert. Il y a quelques jours de cela, le secrétaire au Trésor de l’administration Trump avait plaidé pour une baisse des taux par la Réserve Fédérale (Fed) de -50 points de base en septembre (peu probable), considérant que les taux sont de,150 à 175 points de base au-dessus de leurs niveaux normaux. Clairement, la remise en cause de l’indépendance de la banque centrale est une épine dans le pied du dollar.

Les supports et résistances affichés ci-dessous indiquent respectivement les points bas et hauts au sein desquels les cours devraient évoluer dans le courant de la semaine.

 SupportshebdoRésistanceshebdo
S2S1R1R2
EUR/USD1,14891,15441,17121,1802
EUR/GBP 0,85110,85500,86890,8733
EUR/CHF 0,92180,92590,94000,9412
EUR/CAD 1,58081,59121,62121,6256
EUR/JPY 168,90170,22172,99173,10

Les annonces à suivre

Sauf surprise de dernière minute, le vote de confiance en France devrait conduire à la chute du gouvernement Bayrou. Faut-il craindre une panique sur les marchés ? Jusqu’à présent, les tensions ont été faibles, y compris sur le marché obligataire qui est pourtant aux premières loges. Fin août, des investisseurs japonais ont acheté en grande quantité de la dette française. Nous pensons que l’effet négatif sur l’euro sera également limité – semblable à ce qui s’était passé au moment de la censure du gouvernement Barnier à la fin de l’année 2024.
Si les choses déraillent – ce qui n’est pas notre scénario central – la Banque Centrale Européenne (BCE) pourrait intervenir. En décembre 2024, elle avait acheté en petite quantité et en catimini de la dette française, ce qui avait permis de limiter l’envolée du coût d’emprunt. Nous doutons que des leviers d’urgence – comme le programme OMT (achat en quantité illimité de dette souveraine sur le marché secondaire par la banque centrale en échange de la mise en œuvre d’un programme d’ajustement structurel)* – soient à l’ordre du jour.
La BCE devrait également maintenir ses taux inchangés lors de sa réunion prévue jeudi. Sa présidente, Christine Lagarde, a été limpide à ce sujet. Cela ne veut pas nécessairement dire que le processus de baisse des taux est terminé. Si la croissance faiblit lourdement, une nouvelle baisse de -25 points de base pourrait être opportune.
Côté américain, l’inflation en août sera à surveiller de près. Les derniers chiffres concernant l’évolution des prix montrent des tensions inflationnistes persistantes. Au même moment, le marché du travail ralentit. Cela va complexifier sérieusement la tâche de la Réserve Fédérale (Fed). Le consensus des économistes table toujours sur une diminution des taux en septembre. Ce n’est pas acquis, selon nous. Prudence.

 

*Ce dispositif anti-crise et anti-spéculation avait été présenté en 2014 par le président de la BCE de l’époque, Mario Draghi. Mais il n’a jamais été mis en œuvre. Beaucoup d’États européens rechignent à l’idée de devoir engager des réformes structurelles qui, à court terme, peuvent avoir des effets récessionnistes.

Vous trouverez ci-dessous les publications et événements qui devraient avoir un impact majeur sur l’évolution du cours des devises.

JourHeurePaysIndicateurÀ quoi s'attendre ?
Le 08/09/2025À définirFranceVote de confianceFaible impact sur le marché des changes.
Le 11/09/202514:15Zone euroRéunion de la banque centraleAucune nouvelle baisse des taux attendue.
Le 11/09/202514:30USDInflation américaine (Août)Précédente estimation pour juillet à 2,7% sur un an.
Le 12/09/2025À définirFranceRévision de la note de la dette française par FitchActuellement sous perspective négative. Risque élevé de dégradation.

Les informations présentées sur cette publication, vous sont communiquées à titre purement informatif et ne constituent ni un conseil d’investissement, ni une offre de vente, ni une sollicitation d’achat, et ne doivent en aucun cas servir de base ou être pris en compte comme une incitation à s’engager dans un quelconque investissement.