Rumeurs de marché

Jean qui rit, Jean qui pleure. Alors que l’euro fait l’objet de prises de bénéfices, le dollar américain capitalise sur un rebond technique et sur l’effet positif du shutdown. Autre bonne nouvelle, les positions vendeuses et les positions acheteuses détenues par les spéculateurs sont désormais à l’équilibre. Finies les ventes massives de dollar des derniers mois ! Cela signifie-t-il que la hausse de l’EUR/USD est terminée ? C’est loin d’être certain.

L’agenda économique est loin d’être surchargé. Et pour cause, le shutdown américain continue ! L’administration Trump ne semble pas du tout disposée à trouver des concessions avec les démocrates sur le point épineux des baisses de dépenses prévues dans la santé. Pendant cette période qui est assez fréquente dans la politique américaine, les statistiques gouvernementales ne sont pas publiées (par exemple les chiffres de l’emploi et de l’inflation). Restent les statistiques privées qui sont souvent parcellaires, voire peu fiables. La semaine dernière, l’indice de confiance des petites entreprises américaines – une publication du NFIB qui passe habituellement inaperçue – a été surveillée de près. En septembre, l’indice a reculé pour revenir à ses niveaux de juin. Rien de dramatique, à ce stade. L’économie américaine semble toujours en bonne santé, évoluant légèrement sous son potentiel de croissance estimée entre 2% et 2,5%. Un boost supplémentaire grâce à la Réserve Fédérale américaine (Fed) reste bienvenue à la fin du mois.

Autre fait marquant des derniers jours, la guerre commerciale sino-américain repart de plus belle avec pour point de tension les terres rares. Comme à chaque fois, le marché bruisse de rumeurs concernant une possible dévaluation du yuan chinois qui ne se produit toujours pas. Si cela devait arriver, les dommages collatéraux pourraient être nombreux : hausse des taux de rendement sur le marché obligataire américain – des mouvements d’ampleur similaire à ceux qu’on avait observé en avril dans la foulée du « Jour de la Libération », tension sur la dette des pays très endettés, et déstabilisation des monnaies émergentes les plus fragiles (peso argentin, devise turque etc…). La bonne nouvelle, c’est que nous doutons que ce soit un risque crédible. Depuis 2018, il est systématiquement évoqué, sans qu’il ne soit suivi d’effets. Pourquoi ? La Chine peut jouer avec le taux de change du yuan à la marge. En revanche, une dévaluation est brutale et risque d’entraîner une fuite des capitaux qui aura des effets néfastes à très long terme. Il n’est même pas certain que la dévaluation soit d’ailleurs si bénéfique que cela pour soutenir les exportations – des études récentes montrent que l’industrie chinoise est de moins en moins dépendante de la compétitivité-prix. Comme il fallait s’y attendre, elle est montée en gamme !

Du côté des devises émergentes, le peso argentin fait figure de grand perdant de l’année. Malgré le soutien du Trésor américain, la crise économique et financière perdure. Afin de soutenir le peso, la banque centrale a déjà épuisé 1,1 milliard de dollars de réserves en septembre. En parallèle, le gouvernement argentin intervient également. Par exemple, en une seule journée, il a vendu pour 320 millions de dollars. Tout cela a eu un effet positif très marginal sur le peso, ce qui montre à quel point la crise de confiance est grave. On peut aussi suspecter que des fonds vautours soient à la manœuvre et parient en ce moment sur un défaut du pays – ce qui n’arrange rien évidemment. Heureusement, il y a peut-être une lueur au bout du tunnel. Les élections du 26 octobre, où 50% des sièges du Congrès sont en jeu, vont peut-être conduire à un changement de régime, ce qui pourrait réduire la pression sur le peso et les autres actifs argentins. Rien n’est certain, toutefois. Morale de l’histoire : sortir de plusieurs décennies de crise et regagner durablement la confiance des investisseurs étrangers, même lorsqu’on est soutenu par l’Oncle Sam, n’est pas chose aisée.

Le point technique

Mauvaise passe pour l’euro. Prises de bénéfices depuis plusieurs semaines, rebond technique du Dollar Index et fin des espoirs de renaissance économique européenne (le plan de relance allemand présenté en début d’année tarde à avoir un effet waouh sur la croissance). Tout cela pousse l’EUR/USD à la baisse : -1,13% en un mois. Mais tant que le support à 1,15 n’est pas enfoncé, la tendance est haussière à long terme. Ce sera, en revanche, certainement plus difficile de renouer rapidement avec le seuil technique à 1,20 qu’initialement anticipé.
Quand l’euro pleure, le dollar sourit. C’est toujours ainsi que cela se passe. C’est une nouvelle fois confirmé. Il semble que le shutdown ait été plutôt bénéfique au billet vert. Autre bonne nouvelle, le dernier rapport hebdomadaire Commitment of Traders du régulateur américain, la CFTC, montre que les positions vendeuses et les positions acheteuses détenues par des institutionnels sur le dollar américain sont quasiment à l’équilibre. Il n’y a plus de ventes massives, comme c’était le cas ces derniers mois.

Les supports et résistances affichés ci-dessous indiquent respectivement les points bas et hauts au sein desquels les cours devraient évoluer dans le courant de la semaine.

 SupportshebdoRésistanceshebdo
S2S1R1R2
EUR/USD1,15591,15001,17441,1829
EUR/GBP 0,85130,85800,87000,8790
EUR/CHF 0,92400,92880,93910,9411
EUR/CAD 1,61491,62111,63881,6413
EUR/JPY 173,12173,90176,90177,22

Les annonces à suivre

L’impact du shutdown américain est encore perceptible sur les publications économiques. Il va falloir attendre un moment avant d’avoir la première estimation de l’inflation américaine en octobre – une source d’information habituellement cruciale pour la Fed. Seule l’inflation pour septembre est prévue cette semaine. C’est trop tard pour que cela exerce une influence sur la direction des taux d’intérêt à court terme.

Faute d’avoir beaucoup de statistiques américaines sous la main, les cambistes pourraient prêter davantage attention à la publication du PMI américain ce vendredi qui est prévue en territoire d’expansion – signe que l’économie est toujours résiliente. Ce n’est pas le cas de la France. Sauf surprise, l’activité dans le secteur manufacturier et les services devrait être en contraction en octobre, comme c’était le cas le mois précédent. C’est directement l’effet de l’instabilité politique.

Vous trouverez ci-dessous les publications et événements qui devraient avoir un impact majeur sur l’évolution du cours des devises.

JourHeurePaysIndicateurÀ quoi s'attendre ?
Le 24/10/202509:15FRAPMI manufacturier et des services (Octobre)Première estimation. En septembre, ils étaient en contraction – signe d’une économie en difficulté.
Le 24/10/202514:30USAInflation (Septembre)Publication tardive en raison du shutdown américain.
Le 24/10/202515:45USAPMI manufacturier et des services (Octobre)Première estimation. En expansion en septembre.

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