Tout le monde ne cesse de parler des taxes douanières. Cela crée de la volatilité, y compris sur l’EUR/USD. Mais c’est certainement plus le différentiel de taux de rendement entre les actifs américains et les actifs européens qui explique la tendance baissière de l’EUR/USD. Ce sera LE facteur le plus important à prendre en considération dans les semaines à venir, selon nous.
C’est quitte ou double. La nouvelle politique tarifaire américaine va soit provoquer des effets macroéconomiques limités dans le cas où des accords commerciaux seraient ensuite négociés avec les pays visés par les mesures américaines, soit une récession en cas d’échec des négociations. Dans le cas canadien, ce qui est intéressant, c’est que Donald Trump a décidé d’imposer une taxe de seulement 10% sur le pétrole. Les États-Unis possèdent d’importantes réserves énergétiques stratégiques qui ont augmenté au cours des dernières années. Si Trump voulait entraîner l’économie canadienne dans la récession, il aurait pu facilement le faire en décidant des tarifs douaniers bien plus élevés sur l’énergie. Selon nous, l’objectif de l’administration américaine est de créer davantage d’emplois aux États-Unis en forçant les entreprises basées au Canada à relocaliser leurs activités de l’autre côté de la frontière – ce qui est assez facile, en théorie. Nous restons convaincus que le protectionnisme américain est surtout une tactique de négociation jusqu’à ce qu’un accord soit trouvé – comme ce fut le cas avec la Colombie récemment sur la question des migrants illégaux. Bien évidemment, un échec est toujours possible. Ce serait alors très inflationniste, mauvais pour la croissance et pour les grandes entreprises exportatrices.
La réponse de la Chine aux tarifs douaniers de 10% décidés par Washington est intéressante. Elle montre que personne ne souhaite réellement que la situation ne s’envenime. Pékin a ouvert une enquête contre Google qui n’opère plus dans le pays depuis 2010. En outre, le soja, qui était la première importation des États-Unis en provenance de Chine en 2023, n’est pas visé directement par des mesures de rétorsion. Le yuan, qui est pourtant souvent une variable d’ajustement de la politique chinoise, n’a pas montré de signes inquiétants d’affaiblissement. Il semble que tous les acteurs de cette guerre commerciale souhaitent éviter le pire des scénarios.
Enfin, l’Europe se prépare aussi à un bras de fer compliqué. C’est une question de semaines. Donald Trump a demandé à l’Union Européenne de compenser le déficit américain de 214 milliards de dollars en achetant du pétrole et du gaz. Est-ce faisable ? Oui, mais il y a deux freins. Du côté américain, les infrastructures portuaires n’ont pas de capacités suffisantes pour répondre à une forte hausse des exportations d’hydrocarbures. En revanche, les investissements prévus dans les années à venir pourraient faire passer les importations de gaz naturel liquéfié en provenance des États-Unis de 50% à 70-75%. La capacité des raffineries européennes à traiter le pétrole brut américain, trop léger, est l’autre frein. C’est d’ailleurs pour cela que nous achetons moins de 25% de notre pétrole outre-Atlantique. Mais, dans les deux cas, tout est question d’investissement, de volonté politique…et de temps. Ce n’est certainement pas en 2025 que les hydrocarbures américains vont inonder le marché européen. Mais c’est réaliste pour fin 2026- début 2027. À la fin, nous savons que les Européens n’auront certainement pas d’autre choix que de courber l’échine.
Nous restons convaincus que nous n’allons pas vers un retour dans les années 1930, lorsque le protectionnisme avait entraîné la pauvreté, l’hyperinflation et fait le lit des totalitarismes. Cette comparaison, qui est souvent mise en avant actuellement, est erronée. Pour preuve, l’approche américaine reste mesurée. Nous ne sommes pas face à une guerre commerciale à tout-va. Nous estimons que seulement 5% du PIB américain est directement visé par les mesures protectionnistes décidées contre le Mexique, le Canada et la Chine. Cela reste donc finalement assez marginal et plutôt indolore du point de vue macroéconomique. C’est en outre certainement insuffisant pour entraîner durablement l’inflation à la hausse.
Le point technique
Le marché des changes se focalise évidemment beaucoup sur les taxes douanières. Ce n’est en rien surprenant. Cela créé de la volatilité sur tous les compartiments de marché. Mais il y a un facteur certainement plus important que le protectionnisme pour expliquer l’évolution de l’EUR/USD : c’est l’écart de taux de rendement. Ce dernier ne cesse de se creuser entre les bonds du Trésor américains et les Bunds allemands, ce qui exerce une pression baissière sur l’euro. Le marché a parfaitement intégré que la Réserve Fédérale américaine (Fed) va moins baisser ses taux que la Banque Centrale Européenne (BCE), ce qui a un impact sur le rendement des obligations. Sans surprise, les investisseurs ont tendance à privilégier les actifs qui offrent des rendements plus élevés, donc si les bons du Trésor américain rapportent beaucoup plus que les Bunds allemands, cela pourrait entraîner de nouveaux flux de capitaux vers le dollar américain, affaiblissant l’euro. C’est certainement l’une des tendances de fond à surveiller sur le marché des devises dans les semaines à venir.
Les supports et résistances affichés ci-dessous indiquent respectivement les points bas et hauts au sein desquels les cours devraient évoluer dans le courant de la semaine.
Supports | hebdo | Résistances | hebdo | |
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S2 | S1 | R1 | R2 | |
EUR/USD | 1,0288 | 1,0309 | 1,0450 | 1,0466 |
EUR/GBP | 0,8245 | 0,8291 | 0,8418 | 0,8440 |
EUR/CHF | 0,9290 | 0,9300 | 0,9459 | 0,9490 |
EUR/CAD | 1,4777 | 1,4809 | 1,5002 | 1,5090 |
EUR/JPY | 157,22 | 157,10 | 160,11 | 160,55 |
Les annonces à suivre
Cette semaine va être encore rythmée par les tensions commerciales. Il faut s’y habituer. C’est un nouveau paramètre qui va être inhérent au marché au moins pour les quatre prochaines années. Sur le plan macroéconomique, la semaine est plutôt calme. L’inflation américaine en janvier sera la principale statistique à surveiller. Elle devrait toujours rester à un niveau élevé, proche de 2,9% sur un an. Ça commence à devenir compliqué pour la Fed. Les niveaux de prix sont trop importants pour baisser les taux mais, en même temps, le marché de l’emploi américain aurait besoin d’une baisse des taux pour redémarrer. Il faudra attendre de nouvelles statistiques pour savoir quelle marge de manœuvre la Fed va avoir pour continuer son cycle d’assouplissement.
Vous trouverez ci-dessous les publications et événements qui devraient avoir un impact majeur sur l’évolution du cours des devises.
Jour | Heure | Pays | Indicateur | À quoi s'attendre ? |
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Le 12/02/2025 | 14:30 | USA | Prix à la consommation (Janvier) | Précédent à 2,9% sur un an |
Le 13/02/2025 | 14:30 | USA | Prix à la production (Janvier) | Précédent à 0,2% sur un mois |
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