Cela fait plusieurs mois que nous sommes baissiers sur l’EUR/USD. Mais nous ne nous attendions pas à une telle chute sur un laps de temps aussi réduit. La monnaie unique a perdu près de 2,50% en variation hebdomadaire face au billet vert (avec un point bas à 1,0077). Au moins trois facteurs principaux expliquent cette dégringolade brutale : 1) les cambistes craignent une récession aux Etats-Unis (comme nous l’avons indiqué depuis plusieurs semaines). La baisse de l’euro reflète une appréciation générale du dollar américain, qui sert de valeur refuge en période d’incertitude ; 2) nous sommes face à un momentum market. Le volume de transactions élevé sur l’EUR/USD augmente la dynamique baissière du marché. C’est un phénomène bien connu en bourse et sur le marché des changes ; 3) des facteurs structurels propres à la zone euro incitent également les investisseurs étrangers à se détourner du Vieux-Continent. Les sorties de capitaux se sont accélérées ces dernières semaines. Ce n’est pas uniquement lié aux craintes concernant la récession. Beaucoup d’investisseurs étrangers s’attendent aussi à ce que l’Europe connaisse une grave crise énergétique cet hiver si les conditions climatiques sont mauvaises. Le niveau des stocks de gaz naturel est bas dans plusieurs pays européens, en particulier en Allemagne. Les prix de l’énergie ne cessent d’augmenter. Les prix du gaz ont atteint 160 euros le mégawattheure la semaine passée sur le hub TTF aux Pays-Bas (qui sert de référence pour l’ensemble de l’Union Européenne). La hausse ne devrait pas cesser prochainement puisque la Russie a décidé de réduire encore plus son approvisionnement énergique à l’Europe. La situation est tellement catastrophique que l’Allemagne va présenter prochainement une loi afin de pouvoir prendre le contrôle d’entreprises du secteur énergétique qui pourraient être en difficulté dans les mois à venir. La peur d’une grave crise énergétique en Europe (qui n’est pas à exclure) est certainement un des facteurs importants expliquant la défiance des investisseurs étrangers à l’égard de l’Europe. C’est probablement un point de fragilité à moyen terme bien plus important que le risque de fragmentation en zone euro (que nous avons évoqué il y a quelques semaines de cela avec la hausse des coûts d’emprunt de l’Italie). Dans les conditions actuelles, on voit mal comment l’euro pourrait renouer avec la hausse.
De l’autre côté de la Manche, le Premier ministre Boris Johnson a été poussé à la démission par les membres du Parti Conservateur. Son départ a été salué par les cambistes puisque la livre sterling a connu un sursaut haussier dans la foulée. La situation du Royaume-Uni sur le plan macroéconomique est compliquée. C’est certainement la seule économie développée qui combine à la fois les pressions salariales qu’on observe aux Etats-Unis, la crise énergétique de l’Union Européenne, et le chaos politique propre aux pays émergents. La démission de Johnson ne devrait toutefois pas fragiliser la livre sterling qui a montré sa forte capacité à résister à tous les chocs au cours des dernières années (le Brexit). En revanche, sur le plan politique, il n’y a pas de favori pour lui succéder. Cela risque d’être intéressant. Le prochain Premier ministre britannique aura notamment la lourde tâche de gérer les velléités d’indépendance de l’Ecosse qui a prévu d’organiser un nouveau référendum sur son appartenance au Royaume-Uni en 2023.
Comme quasiment toutes les semaines, les banques centrales continuent d’augmenter les taux directeurs. L’inflation n’a pas disparu des radars. La banque centrale polonaise a porté son taux directeur principal à 6,50% contre 6,00% précédemment. C’est un peu moins que ce qui était attendu par le consensus des analystes (6,75%). Cela a conduit à une baisse du zloty polonais sur le marché des changes (-1,89% en variation hebdomadaire). La banque centrale va poursuivre son cycle de durcissement monétaire dans les mois à venir afin de combattre la hausse générale des prix qui a atteint le niveau stratosphérique de 15,6% en mai sur un an. Le pic d’inflation dans de nombreux pays n’a pas encore été atteint. Cela vaut aussi pour la France où l’inflation devrait dépasser les 6% dans les mois à venir (elle était à 5,8% en juin sur un an, selon les derniers chiffres).
La paire EUR/USD est notre point d’attention majeur cette semaine, sans surprise. Certains analystes considèrent que la baisse est telle qu’il faut désormais se porter acheteur sur l’euro. Ce n’est pas notre avis. La monnaie unique est dans une spirale baissière qu’il sera difficile de stopper. Les fondamentaux sont mauvais (nous les avons évoqués plus haut). L’analyse technique corrobore aussi le scénario d’une baisse prolongée. L’euro a enfoncé la semaine dernière tous les niveaux de support stratégiques. Le prochain seuil à regarder se situe à 0,9820 (donc sous la parité). Comme nous l’indiquions il y a quelques semaines de cela, la parité sur l’EUR/USD n’est pas un seuil technique. C’est uniquement un seuil psychologique pour le marché. Il nous parait évident que l’euro va poursuivre sa phase de dépréciation à court et à moyen terme. On peut anticiper que la Banque Centrale Européenne essaie d’intervenir (verbalement) pour limiter la baisse. Mais l’effet sera quasiment nul sur le taux de change.
Les supports et résistances affichés ci-dessous indiquent respectivement les points bas et hauts au sein desquels les cours devraient évoluer dans le courant de la semaine.
SUPPORTS | HEBDO | RÉSISTANCES | HEBDO | |
---|---|---|---|---|
S2 | S1 | R1 | R2 | |
EUR/USD | 0,9730 | 0,9820 | 1,0371 | 1,0578 |
EUR/GBP | 0,8141 | 0,8321 | 0,8695 | 0,8880 |
EUR/CHF | 0,9591 | 0,9764 | 1,0283 | 1,0350 |
EUR/CAD | 1,2697 | 1,2987 | 1,3386 | 1,3567 |
EUR/JPY | 134,04 | 135,93 | 141,04 | 144,25 |
+33 (0)1 48 09 09 83
Le calendrier économique est chargé. La première estimation de l’inflation aux Etats-Unis en juin sera publiée cette semaine (à la fois l’indice des prix à la consommation et l’indice des prix à la production). L’enjeu est de savoir si le pic d’inflation a été atteint aux Etats-Unis, comme l’annoncent beaucoup d’analystes. Si on en juge par les attentes des marchés obligataires et des marchés actions, le pic d’inflation pour l’économie américaine aurait déjà été atteint il y a trois mois de cela (en se basant sur les anticipations d’inflation).
Enfin, la Banque du Canada doit de nouveau relever son taux directeur pour lutter contre un niveau d’inflation qui n’a pas été connu depuis près de quarante ans. Le marché des changes prévoit une hausse du taux de 75 points de base à 2,25%. C’est probable. C’est déjà intégré dans les prix du marché (sur toutes les paires en CAD). Nous restons baissiers sur la paire EUR/CAD qui évolue dans un grand range depuis près de trois mois.
Vous trouverez ci-dessous les publications et événements qui devraient avoir un impact majeur sur l’évolution du cours des devises.
JOUR | HEURE | PAYS | INDICATEUR | A QUOI S'ATTENDRE ? |
---|---|---|---|---|
12/07 | 11:00 | Indice ZEW du sentiment économique (Juillet) | Précédent à -28. Le risque de récession aux Etats-Unis devrait peser négativement sur le moral des investisseurs allemands. | |
13/07 | 14:30 | Indice des prix à la consommation (Juin) | Il s’agit de la première estimation. Le consensus table sur un repli en variation mensuelle de 0,6% en mai à 0,5% en juin. Si c'est confirmé, ce sera plutôt un signal positif. | |
16:00 | Réunion de la Banque du Canada | Le taux directeur est actuellement à 1,50%. Les analystes anticipent une hausse de 75 points de base (c’est énorme mais les tensions inflationnistes sont à un point haut de 40 ans). | ||
14/07 | 14:30 | Indice des prix à la production (Juin) | Consensus à 0,8% en variation mensuelle (stable par rapport au mois de mai). |
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