C’est mauvais

De plus en plus d’analystes prévoient l’amorce d’un cycle baissier séculaire pour le dollar américain. Les derniers événements (attaques terroristes en Israël et indicateurs économiques moroses) ne corroborent pas cette hypothèse. Nous pensons que le dollar va rester fort pendant encore longtemps. D’ailleurs, les tentatives de rebond face au dollar entamées par plusieurs monnaies, comme l’euro, au cours des dernières séances ont toutes échoué.

Le risque géopolitique fait son grand retour à la suite des attaques terroristes du Hamas contre la population civile en Israël. Du point de vue des marchés financiers, tant que la situation reste circonscrite à la zone actuelle (Proche-Orient), cela devrait avoir un impact direct sur les actifs faibles. On a vu le pétrole bondir fortement lundi 9 octobre à la suite de l’annonce des massacres. Mais par la suite, le cours du baril a chuté. En revanche, si les États-Unis décident de renforcer les sanctions à l’égard de l’Iran, qui est soupçonné d’avoir donné son feu vert au Hamas, l’effet sur les marchés sera beaucoup plus important. Les prochaines semaines vont être cruciales à ce niveau.

A ce stade, ce qui est certain, c’est que le sursaut du risque géopolitique constitue une mauvaise nouvelle supplémentaire alors que la macroéconomie montre des signes d’essoufflement évident. Au-delà des indicateurs macroéconomiques qui, dans la plupart des pays développés, sont mauvais, ce qui est frappant c’est le changement de discours des entreprises. Avant l’été, les entreprises étaient prudemment optimistes pour l’avenir. Ce n’est plus le cas désormais. Elles nous préparent à un monde de faible croissance. Autrement dit, à un retour à la période d’avant-Covid.

Il y a quelques mois de cela, l’économie américaine faisait preuve d’une résistance impressionnante. C’est moins le cas actuellement. Les enquêtes sectorielles pointent vers une baisse de la consommation de services en raison de la forte remontée des taux d’intérêt et de l’inflation persistante. L’indice des prix à la production au mois de septembre a surpris à la hausse la semaine passée, à 2,2% sur un an contre 1,6% précédemment. Si les services ralentissent ce trimestre, c’est évidemment un problème majeur car c’est l’un des principaux moteurs de l’économie américaine (70% de l’activité économique). En parallèle, les investissements résidentiels continuent d’être à la traîne. Là encore, c’est l’effet direct de la hausse du loyer de l’argent. Plusieurs gouverneurs membres de la Réserve Fédérale américaine (à la fois des votants et des non-votants) se sont exprimés ces derniers jours pour laisser entendre que le niveau des taux est désormais approprié aux États-Unis. Il semble que le cycle de durcissement monétaire est probablement sur mode pause pour longtemps. Il est évident que la banque centrale ne souhaite pas que l’économie américaine entre en récession, surtout à l’approche de la présidentielle américaine de 2024. Selon nous, sauf très mauvaise surprise sur le plan de l’inflation, il est probable que le taux directeur américain ne bouge plus jusqu’à la fin de l’année.

C’est la même situation en zone euro. Lors d’une interview auprès de France Info le 10 octobre, le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, a clairement indiqué qu’il n’y aura pas de nouvelle hausse des taux en octobre en zone euro. Villeroy de Galhau est proche de Christine Lagarde. On peut donc supposer qu’elle milite également pour une pause de politique monétaire. Du côté du marché des changes, cela pourrait indiquer qu’à court terme la politique monétaire va jouer un rôle moins important dans l’évolution des devises, en particulier de l’EUR/USD.

Nous avons dressé un panorama économique et géopolitique plutôt morose. Heureusement, il y a une petite lueur d’espoir. Selon des informations de Bloomberg, la Chine pourrait dévoiler un plan de relance de plus de 100 milliards de dollars dans les semaines à venir. Pour l’instant, aucun détail précis n’a filtre et surtout cette information n’a pas été confirmée par Pékin, évidemment. Ce n’est donc pas le moment pour se réjouir. En revanche, si un plan de relance, même d’ampleur plus faible, est dévoilé, ce sera indéniablement une bonne nouvelle. Nous pourrions avoir en Chine et aux Etats-Unis une politique budgétaire expansionniste qui va soutenir la demande à partir de 2024. Il y a toujours un décalage entre la mise en œuvre des actions de relance et leur impact sur l’économie. Le seul bémol, c’est l’Europe. Pour l’instant, la politique budgétaire en zone euro est restrictive. C’est une aberration alors que la hausse des salaires en réel est négative (si on prend en compte l’inflation) et que toutes les études économiques montrent clairement qu’il y a un problème de demande pour stimuler l’activité économique.

Le point technique

Sans surprise, avec un univers économique qui se dégrade et le retour du risque géopolitique, même s’il reste circonscrit pour le moment, c’est un cocktail de marché qui est idéal pour le dollar américain. Le dollar index (qui représente l’évolution du billet vert face à un panier de devises majeures) est toujours orienté à la hausse – autour de 106. On a pu observer ici et là des tentatives de rebond face au dollar. Ce fut le cas de l’EUR/USD mais cela a vite tourné court. Contrairement à certains analystes forex qui considèrent que le dollar américain va amorcer prochainement un nouveau cycle séculaire de baisse, nous pensons que le dollar va rester fort à court et à moyen terme. Les arguments en faveur d’une baisse prolongée du dollar ne nous paraissent pas convaincants à ce stade (baisse de la productivité des États-Unis, politique budgétaire expansionniste, dédollarisation). Pour l’instant, ce que nous observons c’est que les cambistes cherchent à se protéger contre le risque d’une stagflation (voire pour certains contre le risque d’une récession), ce qui avantage mécaniquement le billet vert.

Les supports et résistances affichés ci-dessous indiquent respectivement les points bas et hauts au sein desquels les cours devraient évoluer dans le courant de la semaine.

 SupportshebdoRésistanceshebdo
S2S1R1R2
EUR/USD1,04901,05051,07341,0850
EUR/GBP 0,84330,85010,87450,8809
EUR/CHF 0,94010,94230,97010,9823
EUR/CAD 1,42001,43091,45991,4645
EUR/JPY 155,99157,01159,12160,50

Les annonces à suivre

Outre le risque géopolitique qui va rester dans tous les esprits, il faudra surveiller les chiffres de l’inflation en Europe. L’indice des prix à la consommation (IPC) en zone euro ne devrait pas susciter un grand intérêt – il s’agit de la dernière estimation qui est toujours conforme à la première. En revanche, si vous êtes exposés à la livre sterling, il sera certainement intéressant de savoir si le processus de désinflation se poursuit. Le chiffre de l’IPC pour le mois d’août avait surpris. Le marché attend confirmation de la décélération des pressions inflationnistes. Cela pourrait causer un peu de volatilité pour les paires en GBP. Nous doutons toutefois que cela fasse sortir l’EUR/GBP de son range de long terme compris entre 0,85 et 0,87. C’est une paire stable.

Vous trouverez ci-dessous les publications et événements qui devraient avoir un impact majeur sur l’évolution du cours des devises.

JourHeurePaysIndicateurÀ quoi s'attendre ?
Le 18/10/202308:00UKIndice des prix à la consommation (Septembre)Première estimation pour le mois de septembre. Précédent à 6,7% sur un an.
Le 18/10/202311:00EURIndice des prix à la production (Septembre)Il s’agit de la dernière estimation pour le mois de septembre, probablement conforme à la première (4,3% sur un an)
Le 19/10/202314:30USAIndice manufacturier de la Fed de Philadelphie (Octobre)Précédent à -13,5.

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