Combattre l’inflation à tout prix

Le défi est le même pour toutes les banques centrales à travers le globe : combattre l’inflation. Pour certaines, la tâche s’avère beaucoup plus compliquée que pour d’autres. En Turquie, l’indice des prix à la consommation est ressorti quasiment à 70% en variation annuelle en avril et l’indice des prix à la production (qui donne une indication de l’inflation à venir) est à trois chiffres. Aux Etats-Unis, l’inflation est moins élevée, à 8,5% en avril. Mais c’est tout aussi inconfortable pour les consommateurs et les entreprises. Sans surprise, la Réserve Fédérale américaine (Fed) a été contrainte d’agir la semaine dernière. Elle a décidé une hausse de son taux directeur de 50 points de base. C’est une première depuis vingt-deux ans. Il est désormais compris entre 0,75% et 1,0%. D’autres hausses de taux sont « sur la table » dans les mois à venir, a précisé Jerome Powell, le président de l’institution. Il a indiqué que deux hausses de taux d’ampleur similaire à celle du mois de mai sont possibles en juin et en juillet (respectivement le 15 juin et le 27 juillet). Des mesures de retrait de la liquidité (réduction du bilan de la banque centrale) ont été annoncées également. Le processus va commencer le mois prochain, à hauteur de 95 milliards de dollars par mois lorsque le rythme de croisière aura été atteint. Le retrait de la liquidité devrait permettre, entre autres, de réduire les prix de l’immobilier qui ont fortement grimpé depuis la Covid. En revanche, on sait qu’un tel processus n’est pas sans risques. Cela peut entraîner de forts remous sur les marchés financiers, ce qui pourrait contraindre la Fed à arrêter la réduction du bilan plus vite que prévu. Powell a aussi reconnu lors de sa conférence de presse que les mesures dévoilées n’auront aucun effet sur l’envolée des prix des matières premières. La baisse de l’inflation va être un exercice compliqué. Le point positif, c’est que l’économie américaine est certainement en mesure de subir plusieurs hausses de taux consécutives (qui entraînent par exemple un accès à la liquidité moins aisé). Le PIB des Etats-Unis s’est contracté au premier trimestre, mais c’était essentiellement lié à des facteurs extérieurs (commerce international). La consommation, qui reste le principal moteur de la croissance économique, se maintient, en particulier grâce à un marché de l’emploi très dynamique.

De ce côté-ci de l’Atlantique, l’attention s’est portée surtout sur la réunion de la Banque d’Angleterre (BoE). Elle a jeté un froid sur le marché des changes. Le taux directeur principal a été porté, comme prévu, à 1% (soit une hausse de 25 points de base). C’est un point haut depuis 2009. Mais la BoE a dressé un panorama catastrophique de l’économie britannique pour les mois à venir : l’inflation devrait atteindre deux chiffres cette année (!) et le risque de récession s’est fortement accru en l’espace de quelques mois. D’anciens membres du comité de politique monétaire de la BoE (l’instance chargée de piloter les taux directeurs) estiment même que le Royaume-Uni est déjà en récession. De notre point de vue, l’économie développée la plus fragilisée en cette période de post-Covid est celle du Royaume-Uni, juste avant l’économie allemande (qui montre aussi de sérieux signes de faiblesse).

Enfin, le débat s’intensifie en zone euro à propos de l’opportunité d’une première hausse du taux directeur (qui pourrait être d’ampleur faible, peut-être de l’ordre de 15 points de base seulement). Plusieurs membres du Conseil des gouverneurs ont clairement indiqué qu’une hausse des taux pourrait être opportune dans les mois à venir (soit en juillet, soit en septembre). Cela pourrait apporter un peu de soutien à la monnaie unique face au dollar américain (et donc réduire au passage l’inflation importée). Mais il faudra peut-être attendre encore quelques semaines avant d’avoir plus de visibilité sur la suite de la politique monétaire en zone euro. Seul un membre du Conseil des gouverneurs, Fabio Panetta, a indiqué publiquement qu’une hausse des taux entraînerait essentiellement des conséquences négatives, en accentuant le ralentissement économique déjà à l’œuvre (discours tenu jeudi dernier).

Sur le marché des changes, l’euro a effectué un rebond face à ses principales contreparties (en variation hebdomadaire) : +0,30% face au dollar américain, +0,63% face au dollar canadien, +1,73% face au franc suisse et +2,33% face à la livre sterling. Il s’agit essentiellement d’un rebond technique et non pas d’un retour en grâce durable de la monnaie unique. L’euro est toujours dans une tendance baissière de long terme face au billet vert tant que la résistance située à 1,0730 n’est pas franchie (c’est pour l’instant un objectif lointain). Notre cible se situe à 1,0408 (qui fait office de support). Elle pourrait être atteinte dans les semaines à venir. Il faut aussi s’attendre à des prises de bénéfices sur les paires où l’appréciation de la monnaie unique a été importante ces dernières séances (face à la livre sterling, en particulier).

Les supports et résistances affichés ci-dessous indiquent respectivement les points bas et hauts au sein desquels les cours devraient évoluer dans le courant de la semaine.

 SUPPORTSHEBDORÉSISTANCES HEBDO
S2S1R1R2
EUR/USD1,02481,04081,06521,0730
EUR/GBP 0,80580,82830,86490,8732
EUR/CHF 1,01401,02781,05881,0812
EUR/CAD 1,33821,34971,39581,4120
EUR/JPY 134,28135,89139,17140,81

+33 (0)1 48 09 09 83

L’inflation sera encore une fois le point d’attention majeur dans les séances à venir. Les publications de l’indice des prix à la consommation (le 11 mai) et de l’indice des prix à la production (le 12 mai) aux Etats-Unis vont être le point d’orgue de la semaine. Sauf surprise de dernière minute, la hausse devrait continuer dans les deux cas. Cela va simplement renforcer les attentes en termes de durcissement monétaire par la Fed. En théorie, c’est positif pour le dollar américain (face aux autres devises).

Vous trouverez ci-dessous les publications et événements qui devraient avoir un impact majeur sur l’évolution du cours des devises.

JOURHEUREPAYSINDICATEURA QUOI S'ATTENDRE ?
10/0511:00Indice ZEW du sentiment économique (Mai)Chute à -48 contre -41 au mois d’avril.
11/0514:30Indice des prix à la consommation (Avril)Le consensus des analystes table sur une nouvelle progression à 8,7% en variation annuelle (contre 8,5% en mars).
12/0514:30Indice des prix à la production (Avril)Ralentissement de la hausse en variation mensuelle : 0,5% contre 1,4% en mars.
13/0516:00Indice de confiance de l’Université du Michigan (Mai)Baisse à 63,8 contre 65,2 en avril (le repli est lié à la progression de l’inflation).

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