La Banque Centrale Européenne fait son grand retour cette semaine. Si vous espérez en savoir plus sur le timing de la baisse des taux en zone euro, vous allez être déçus. Selon nous, l’institution va tout faire pour retarder la première baisse afin de laisser primeur à la Réserve Fédérale américaine.
En Europe, la situation macroéconomique est toujours compliquée. Certains pensaient que la France pourrait être le mouton noir européen de la décennie 2020 à cause de son incapacité à se réformer. Peine perdue, c’est l’Allemagne qui l’est. On savait déjà que le secteur manufacturier allemand était en difficulté (effondrement de la production industrielle, y compris dans le secteur chimique qui était le point fort de l’économie outre-Rhin). Les difficultés s’accentuent avec l’émergence de problèmes dans le secteur bancaire. En cause : la Pfandbriefbank (PBB) – une vénérable petite banque allemande, basée à Munich, dont l’histoire remonte à Frédéric le Grand (18ème siècle) et qui n’a pas fait faillite depuis 1901. Elle est spécialisée dans le crédit immobilier commercial en Europe…et aux États-Unis. Problème : depuis la Covid, l’immobilier commercial s’effondre des deux côtés de l’Atlantique. Environ 15% du portefeuille de la PBB, soit 5,4 milliards d’euros, est directement exposé à l’immobilier commercial américain dont 80% concerne des bureaux. Il faut s’attendre à des pertes importantes qui pourraient causer la faillite de la banque. C’est ce que craint le marché. Pour l’instant, il n’y a pas de risque de contagion. Il n’y en aura peut-être pas, d’ailleurs. Mais cela souligne bien à quel point l’Allemagne est face à des défis énormes, aussi bien concernant son secteur manufacturier, que le secteur bancaire et financier. C’est également une piqûre de rappel bienvenue. D’autres acteurs de l’immobilier commercial vont certainement subir des pertes importantes cette année. Certains devront être renfloués. D’autres devront se vendre à bas prix. La bonne nouvelle c’est que ça tient bien en France. Le modèle de banque universelle semble faire ses preuves, encore une fois.
Au Japon, la nouvelle hausse de l’inflation a ravivé le débat concernant une possible hausse des taux. L’indice des prix à la consommation (IPC) est ressorti à 2,2% sur un an en janvier (contre 1,9% prévu par le consensus). Hors éléments volatils, l’inflation sous-jacente a atteint 2,00%. C’est une performance encourageante. Toutefois, nous doutons de plus en plus que la Banque du Japon soit vraiment disposée à normaliser sa politique monétaire. Le marché monétaire table sur une première hausse en avril prochain. Ce n’est pas garanti. N’oublions pas qu’un yen faible (du fait du faible loyer de l’argent) constitue un élément de soutien majeur à l’économie nippone. En fin d’année dernière, c’était d’ailleurs le seul facteur de hausse de la croissance. Nous gardons en tête que la paire EUR/JPY peut expérimenter une volatilité accrue dans les semaines à venir. Mais, pour le moment, ce sont toujours les acheteurs qui ont la main (hausse de 4,9% depuis le début de l’année).
En Chine, il y a quelque chose d’anormal qui est en train de se produire. Le taux de change du yuan est plutôt sur une tendance baissière ces derniers mois mais le bilan de la banque centrale chinoise montre une hausse des réserves. En règle générale, lorsque le yuan diminue, les réserves également car la banque centrale intervient (vend des actifs) pour affaiblir sa monnaie. Certains experts considèrent que ce n’est certainement pas la banque centrale mais plutôt les banques commerciales chinoises qui sont à la manœuvre et interviennent directement sur le marché des changes. C’est probable. C’est arrivé par le passé, sur ordre de Pékin. Dans tous les cas, nous continuons de tabler sur une lente dépréciation du yuan dans les mois à venir qui est nécessaire pour relancer la machine économique via les exportations. Les tentatives de développer une consommation intérieure en mesure de réduire la dépendance aux exportations ont échoué jusqu’à présent. Il faut donc recourir aux bonnes vieilles méthodes.
Le point technique
Sur le marché des changes, la volatilité implicite sur les principales paires de devises est toujours basse. C’est le cas depuis déjà plusieurs mois. Nous ne pensons pas que cela va changer dans l’immédiat. Il n’y a pas de changement majeur de tendance à noter. Nous sommes toujours positionnés à la baisse sur l’EUR/USD, à la hausse sur l’EUR/JPY (en raison de la faiblesse structurelle du yen japonais) et neutre sur l’EUR/GBP (situation de range de trading).
En revanche, petite surprise du côté de la Banque Nationale Suisse (BNS). Les données portant sur l’évolution des dépôts auprès de la banque centrale montrent qu’elle est intervenue sur le marché des changes pour affaiblir le franc en janvier dernier. C’est encore probablement le cas. Mais nous n’avons pas accès aux données pour le savoir. Le taux de change réel effectif de la devise suisse est toujours proche de son niveau record. C’est une situation inconfortable pour la banque centrale et les entreprises exportatrices du pays, d’où la nécessité de faire baisser le taux de change du franc.
Les supports et résistances affichés ci-dessous indiquent respectivement les points bas et hauts au sein desquels les cours devraient évoluer dans le courant de la semaine.
Supports | hebdo | Résistances | hebdo | |
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S2 | S1 | R1 | R2 | |
EUR/USD | 1,0678 | 1,0720 | 1,0945 | 1,1045 |
EUR/GBP | 0,8301 | 0,8401 | 0,8656 | 0,8690 |
EUR/CHF | 0,9333 | 0,9419 | 0,9609 | 0,9645 |
EUR/CAD | 1,4401 | 1,4511 | 1,4833 | 1,4891 |
EUR/JPY | 160,11 | 162,09 | 164,55 | 164,90 |
Les annonces à suivre
Après une période d’accalmie, les banques centrales sont de retour. La Banque du Canada va ouvrir le bal. Passez votre chemin, il n’y a rien à voir. C’est ainsi qu’on pourrait résumer la teneur de la réunion. Le marché des devises considère que la probabilité d’une baisse des taux est de seulement 30% (très improbable). Le statu quo de politique monétaire devrait perdurer.
C’est à peu près le même scénario pour la Banque Centrale Européenne (BCE). Au regard de la dégradation prononcée de la conjoncture en zone euro, la logique voudrait que l’institution baisse rapidement ses taux afin de soutenir les pans de l’économie les plus en difficultés, comme l’immobilier. Mais cela n’arrivera pas. La BCE va certainement attendre sagement que la Réserve Fédérale américaine (Fed) entame le cycle d’assouplissement monétaire afin de faire de même. Bref, une nouvelle erreur de politique monétaire à mettre à l’actif de la BCE. Ce n’est pas la première. En pleine crise financière mondiale, la BCE dirigée par Jean-Claude Trichet avait augmenté son taux directeur à cause de possibles pressions sur les prix liées au pétrole. Belle erreur. Il fallut ensuite baisser les taux plus que prévu pour venir en aide aux États et aux banques en difficulté. On dit bien qu’on n’apprend jamais de ses erreurs…
Vous trouverez ci-dessous les publications et événements qui devraient avoir un impact majeur sur l’évolution du cours des devises.
Jour | Heure | Pays | Indicateur | À quoi s'attendre ? |
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Le 05/03/2024 | 16:00 | USA | ISM non manufacturier (Février) | Précédent à 53,4. |
Le 06/03/2024 | 14:15 | USA | Enquête sur l’emploi privé ADP (Février) | Précédent à 107k. |
Le 06/03/2024 | 15:45 | CAN | Réunion de la banque centrale | Aucun changement. |
Le 07/03/2024 | 14:15 | EUR | Réunion de la banque centrale | Aucun changement. |
Le 08/03/2024 | 11:00 | USA | Rapport sur l’emploi du Département du Travail (Février) | Précédent 353k (susceptible d’être révisé à la baisse). |
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