Ne pas se tromper

Enfin ! La Fed va amorcer son cycle de baisse des taux ce mercredi. C’est certain. En revanche, le marché est divisé quant à l’ampleur de la première baisse. D’un côté, il y a ceux qui s’attendent à ce que la Fed frappe fort avec une baisse de 50 points de base car le risque de récession a augmenté. De l’autre, il y a ceux qui prévoient que la Fed adopte la stratégie des petits pas avec une baisse de 25 points de base. Dans quel camp êtes-vous ?

Comme prévu, la Banque Centrale Européenne (BCE) a maintenu son rythme de baisse des taux – avec une nouvelle baisse de 25 points de base. C’est toutefois certainement insuffisant au regard de l’état de l’économie de la zone euro. Certes, le chômage décroît. Mais tous les autres signaux sont au rouge : l’investissement des entreprises, la confiance des consommateurs, l’évolution de la dette publique et même le coût de l’énergie qui est très élevé si on compare à la situation américaine. Comment avoir une industrie compétitive ou même développer une filière technologique de l’IA sans énergie à bas coût ? Nous craignons que la zone euro ne s’engouffre dans une longue stagnation, qui sera accentuée par le déclin démographique. D’une certaine manière, c’est déjà enclenché. L’écart de richesse par habitant est de 25 % entre la zone euro et les États-Unis.
Côté américain, le marché continue d’évoquer la possibilité d’une récession qui n’est toutefois confirmée par aucun indicateur macroéconomique. Comme nous le rappelions en détail dans notre édition de la semaine dernière, le secteur manufacturier montre des signes de fragilité (c’est le cas aussi dans les autres pays) mais le consommateur américain se porte très bien parce que son patrimoine financier et immobilier a fortement augmenté depuis la Covid. Historiquement, aucune récession aux États-Unis (à l’exception de phénomènes extraordinaires comme la Covid) n’est survenue avec un tel dynamisme de la consommation. Par conséquent, nous estimons que la Réserve Fédérale américaine (Fed) va baisser son taux directeur de 25 points de base ce mercredi. Nul besoin de frapper fort avec une baisse de 50 points de base comme anticipé par certains analystes. Au cours des 40 dernières années, hors réunion d’urgence comme en mars 2020, la Fed n’a baissé son taux directeur de 50 points de base qu’à une seule reprise. Au regard de l’état de l’économie, ce serait une surprise si elle prenait une telle décision. En outre, cela serait interprété comme un signe de panique de la part de la banque centrale. Une telle baisse confirmerait implicitement que la Fed a peur d’une récession…Comme le marché est très divisé sur l’issue de la réunion de ce mercredi soir, il est probable que la volatilité soit plus importante sur les actifs américains, notamment le dollar, que lors des réunions précédentes.
Il faut aussi garder à l’esprit que la Fed est « data-dependent », c’est-à-dire que sa politique monétaire évolue en fonction des dernières statistiques. Elle ne s’engage pas à l’avance sur une rythme de baisse des taux. Cela part d’une bonne intention : coller au plus près à l’évolution économique et éviter de prendre des mauvaises décisions. Mais cela a aussi pour conséquence d’accroître durablement la volatilité. Les marchés ont besoin de visibilité. Ce ne sera pas le cas à l’issue de la réunion de cette semaine.
De notre point de vue, après cette première baisse, la Fed devrait de nouveau baisser à deux reprises ses taux cette année – soit une baisse de 75 points de base en 2024.
Sauf si l’élection présidentielle de novembre est contestée, nous n’anticipons pas que le scrutin exerce une quelconque influence sur la trajectoire de la politique monétaire. Une présidence Harris aurait autant d’impact sur la Fed que l’administration Biden ; c’est-à-dire nul. Une présidence Trump peut accroître la volatilité sur les marchés financiers. Mais elle ne devrait pas remettre en cause l’indépendance de la banque centrale. En outre, Trump a confirmé ne pas souhaiter remplacer Jérôme Powell avant la fin de son mandat.

Le point technique

Sur le marché des devises, les paires majeures sont toujours en situation de range. C’est le cas de l’EUR/USD qui peine à franchir le cap situé à 1,12. Il y a une forme d’attentisme qui s’explique certainement par l’incertitude politique outre-Atlantique et le manque de visibilité sur le rythme de baisse des taux. Même les devises émergentes sont plutôt stables, l’EUR/HUF (devise hongroise) est dans un range étroit compris entre 390 et 400 depuis plusieurs mois. La seule paire à surveiller est peut-être l’EUR/AUD (devise australienne) qui est engagé dans une tendance baissière nette – cela s’explique par le fait que la baisse des taux en Australie sera plus lente que dans les autres économies développées. Des cambistes envisagent même une hausse des taux !

Les supports et résistances affichés ci-dessous indiquent respectivement les points bas et hauts au sein desquels les cours devraient évoluer dans le courant de la semaine.

 SupportshebdoRésistanceshebdo
S2S1R1R2
EUR/USD1,07441,08921,11451,1190
EUR/GBP 0,82800,83090,84880,8510
EUR/CHF 0,92550,92990,94900,9600
EUR/CAD 1,47821,48001,51221,5244
EUR/JPY 154,40155,33158,99160,13

Les annonces à suivre

Outre la Fed, deux autres banques centrales vont se réunir cette semaine : la Banque d’Angleterre (BoE) et la Banque du Japon (BoJ). Maintenant que l’inflation est sous contrôle (à l’exception de l’inflation dans les services qui reste un casse-tête pour la plupart des pays développés), la BoE devrait de nouveau baisser son taux directeur de 25 points de base. C’est déjà en partie intégré dans les prix offerts par le marché. Du côté de la BoJ, nous nous attendons à un maintien des taux directeurs inchangés. Mais le gouverneur a laissé entendre qu’une nouvelle hausse des taux de 10 points de base est imminente si les conditions économiques s’y prêtent. Le dernier chiffre du PIB est encourageant : boucle prix-salaires, rebond de la consommation, investissement des entreprises qui se maintient. Nous tablons sur une hausse des taux au quatrième trimestre. À noter que le carry trade sur le yen n’est désormais plus un problème. Selon une estimation de Goldman Sachs, environ 70-75% des positions non hedgées sur le yen ont été liquidées pendant le mois d’août. Certains craignent qu’un événement similaire survienne avec le yuan car beaucoup de positions prises par des institutionnels (surtout des fonds américains) ne sont pas hedgées. Ce n’est pas pour le moment un sujet. Les positions en question n’ont rien à voir en taille avec celles sur le yen. Néanmoins, c’est un risque à garder en tête…cela rappelle surtout l’importance d’avoir toujours une couverture de change appropriée.

Vous trouverez ci-dessous les publications et événements qui devraient avoir un impact majeur sur l’évolution du cours des devises.

JourHeurePaysIndicateurÀ quoi s'attendre ?
Le 18/09/202420:00USARéunion de la banque centrale+25 ou +50 points de base
Le 19/09/202413:00UKRéunion de la banque centrale+25 points de base
Le 20/09/202405:00JPRéunion de la banque centraleAucun changement de politique monétaire.

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