Pari réussi ?

Retenez bien cette date : le 8 février, la Cour suprême des États-Unis va examiner si les États américains peuvent disqualifier Donald Trump du scrutin présidentiel en raison de sa contestation du résultat de la présidentielle de 2020 et de sa participation aux événements du 6 janvier 2021. Tout est possible. Ce qui signifie qu’on pourrait avoir un regain de volatilité sur le marché des changes, et potentiellement un repli sur le dollar américain en cas de disqualification de Trump.

La Réserve Fédérale (Fed) est en passe de réussir son pari : faire chuter l’inflation sans provoquer une récession. Toutes les conditions semblent réunies pour un atterrissage en douceur de l’économie américaine. L’inflation se rapproche de 2%. Toutes les principales mesures de l’inflation (indice des prix à la consommation, inflation sous-jacente et indice PCE core) se situent entre 3% et 4%. Il y a un bémol : l’inflation dans les services est encore trop élevée (5,3% sur un an). Mais elle diminue. Il faut également un rééquilibrage du marché de l’emploi. C’est ce qui est en train de se produire. Les créations d’emplois ralentissent et reviennent à un rythme plus normal (autour de 200 000 par mois). Il faut évidemment que la croissance soit au rendez-vous. C’est le cas. L’acquis de croissance pour l’année 2024 est déjà à 1,2%. Au regard des bonnes statistiques publiées au cours du mois de janvier, les économistes ont régulièrement revu à la hausse leurs prévisions de croissance pour 2024, actuellement à 1,5%. C’est nettement mieux qu’en zone euro où la récession pointe. Dans ces conditions, une baisse des taux n’est pas urgente. C’est ce qu’a rappelé le président de la Fed, Jerome Powell, à l’issue de la réunion de janvier du FOMC (l’organe chargé de la politique de taux aux États-Unis). Le marché monétaire a dû revoir ses anticipations dans la foulée. Une baisse des taux au mois de mars est déjà exclue. Les investisseurs parient désormais sur les mois de mai et de juin. Mais, si l’économie continue d’être aussi résiliente dans les mois à venir, il n’est pas exclu que la première baisse des taux ait lieu plus tard, par exemple au deuxième semestre. Ce n’est pas du tout un scénario envisagé par le marché des changes. Si cela devait se produire, il y a fort à parier qu’il y aurait d’importants remous sur les devises, surtout le dollar et l’euro.
Pendant que nous débattons dans les pays développés du moment opportun pour baisser les taux, les pays émergents, qui ont commencé le processus dès 2023, continuent d’assouplir leur politique monétaire. La semaine dernière, pas moins de trois grands pays émergents de la zone Amérique latine ont diminué leurs taux : le Chili de 100 points de base à 7,25%, le Brésil de 50 points de base à 11,25% et la Colombie de 25 points de base à 12,75%. Ce n’est que le début. Des baisses de taux plus importantes sont attendues dans les mois à venir. Cela a pour effet de soutenir les économies concernées. Alors que dans la plupart des économies développées, la croissance va être sous le potentiel cette année, elle devrait être supérieure au potentiel dans les pays émergents (à 3,9% selon le Fonds Monétaire International). En outre, cela induit l’arrivée massive de capitaux qui ont tendance à soutenir les devises de ces pays. Le meilleur exemple en la matière est certainement le Mexique. Le pays connaît un boom sans précédent des investissements en provenance des investisseurs étrangers ce qui constitue un soutien structurel au peso.
En ce début d’année, il y a aussi des accidents de parcours. C’est le cas des deux principales économies d’Afrique qui font face à une situation financière de plus en plus complexe. La semaine dernière, le Nigéria a été contraint de dévaluer la monnaie nationale, le naira, d’environ 30% (après une dévaluation d’ampleur similaire en juin dernier). Il n’est pas certain que ce soit suffisant. L’Egypte est également en difficulté. La pression ne cesse de s’accroître pour que Le Caire opère une dévaluation. La livre égyptienne au taux officiel est actuellement inférieure de 50% à son niveau sur le marché noir – qui reflète certainement mieux la juste valeur de la devise. Une dévaluation est inévitable, même si elle ne va pas résoudre tous les problèmes structurels de l’économie égyptienne.

Le point technique

Sur le marché des changes, la tendance est très clairement favorable au dollar américain. Sur la période allant d’octobre 2023 à fin 2023, le dollar a chuté. Le marché anticipait, notamment, que la croissance en zone euro allait dépasser celle de l’économie américaine. Personne ne croit à ce scénario désormais. On observe depuis le début d’année un retour des investisseurs et des spéculateurs à l’achat sur le dollar. Ce n’est que le début, selon nous.

Deux facteurs structurels vont favoriser un dollar fort :
1) attrait de l’économie américaine. Alors que chez nous la productivité ne cesse de décliner, la productivité américaine a augmenté de 3,4% au dernier trimestre de 2024. Ce n’est qu’une statistique parmi tant d’autres qui montre la résilience de l’économie des États-Unis.
2) la Fed ne va vraisemblablement pas baisser ses taux aussi vite que prévu, et sûrement dans une ampleur moindre que prévu.

Tout cela va dans le sens d’une baisse de l’EUR/USD, qui est notre scénario central pour l’instant.

Les supports et résistances affichés ci-dessous indiquent respectivement les points bas et hauts au sein desquels les cours devraient évoluer dans le courant de la semaine.

 SupportshebdoRésistanceshebdo
S2S1R1R2
EUR/USD1,06111,07231,10011,1054
EUR/GBP 0,84110,84330,86110,8699
EUR/CHF 0,92340,92880,94550,9601
EUR/CAD 1,44011,44321,46781,4801
EUR/JPY 157,01158,09160,99161,68

Les annonces à suivre

Cette semaine, il sera difficile de faire l’impasse sur la politique. Le 8 février, la Cour suprême des États-Unis va examiner si les États américains peuvent disqualifier Donald Trump du scrutin présidentiel en raison de sa contestation du résultat de la présidentielle de 2020 et de sa participation aux événements du 6 janvier 2021. Tout est possible. Nous n’avons aucune visibilité sur la décision qui va être prise. A minima, cela peut engendrer un regain de volatilité sur les grandes paires. En cas de disqualification de Trump (on craint toutefois les conséquences politiques d’une telle décision), il est probable que cela entraîne un regain d’aversion au risque sur l’ensemble des marchés financiers qui pourrait être favorable au dollar américain. Prudence à l’approche de cette échéance clé et qui est un peu passée sous les radars, jusqu’à présent.

Vous trouverez ci-dessous les publications et événements qui devraient avoir un impact majeur sur l’évolution du cours des devises.

JourHeurePaysIndicateurÀ quoi s'attendre ?
Le 05/02/202400:00CHIBaisse effective du taux de réserve obligatoire des banques de 50pdbC’est une mesure de liquidité qui va permettre d’injecter 1000 milliards de yuans dans l’économie.
Le 05/02/202416:00USAIndice ISM non manufacturier (Janvier)Précédent à 50,6.
Le 08/02/2024Non définiUSADécision de la Cour suprême concernant Donald TrumpLa Cour suprême va examiner si les États américains peuvent disqualifier Donald Trump du scrutin présidentiel en raison de ses tentatives d'annuler le résultat des élections de 2020.

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