Une pause et ça repart !

Les banques centrales ont essayé, tant bien que mal, de dresser une feuille de route pour les mois à venir. Mais les intervenants de marché n’ont pas toujours été convaincus. La réalité, c’est que le niveau d’incertitude concernant la trajectoire économique a rarement été aussi élevé. Dans ce contexte, la bonne attitude consiste à minimiser son risque et à adopter la bonne stratégie de couverture de change. Essayer de deviner où sera l’EUR/USD dans trois mois ou six mois est un exercice trop complexe.

Finalement, la Réserve Fédérale américaine (Fed) n’a pas pris à revers le marché, à l’inverse de la Banque de Réserve d’Australie il y a peu. Comme prévu, la banque centrale n’a pas augmenté son taux directeur en juin, le laissant entre 5,00-5,25%. En revanche, elle a revu nettement à la hausse ses projections économiques. L’inflation sous-jacente (qui est le bon baromètre pour mesurer les tensions inflationnistes) devrait refluer moins rapidement que prévu, le chômage devrait continuer de baisser en deuxième partie d’année et surtout la croissance devrait se maintenir à un bon rythme. La Fed prévoit une hausse du PIB de 1% en 2023. Après une progression de 1,3% au premier trimestre et probablement de 2% ce trimestre, cela signifie que l’activité devrait être molle mais positive au deuxième semestre. Disparu le spectre d’une récession (même si le marché des changes n’est clairement pas convaincu par cela). Etant donné la solidité relative de l’économie américaine, la Fed considère que de nouvelles hausses de taux sont nécessaires, au moins deux cette année, ce qui porterait le taux principal dans la borne comprise entre 5,50% et 5,75%. Là encore, le marché n’est pas complètement convaincu. Beaucoup d’analystes prévoient que l’économie américaine va sombrer en récession en deuxième partie d’année, ce qui valide l’hypothèse d’une baisse des taux. De notre point de vue, l’entrée en récession n’est pas acquise (il faut aussi garder en tête que les autorités américaines ont des critères nombreux pour définir une récession alors que de ce côté-ci de l’Atlantique il suffit qu’il y ait deux trimestres consécutifs de contraction du PIB pour qu’une récession soit actée). Par conséquent, nous doutons qu’une baisse des taux soit réellement un scénario plausible à court terme. En revanche, on peut légitimement débattre de la marge de manœuvre réelle de la Fed pour augmenter encore deux fois les taux et de la durée de la pause de politique monétaire. Comme la Fed est data-dependent, à l’instar des autres principales banques centrales, il est très difficile d’avoir une visibilité concernant l’évolution de la politique monétaire au-delà de deux à trois mois. Du point de vue du FX, cela signifie que nous sommes désormais dans un environnement de marché plus incertain. Pour preuve : la hausse annoncées des taux par la Fed devrait légitimement soutenir le dollar américain. Il n’en est rien. Les grandes banques d’investissement continuent de penser que le dollar américain va entrer après l’été dans un cycle baissier durable. Quelqu’un a tort. Un tel niveau d’incertitude est assez rare. Au lieu de deviner où va aller le marché dans trois ou six mois, ce qu’il faut absolument faire, c’est surtout minimiser sa prise de risque et mettre en place une bonne stratégie de couverture lorsqu’on est confronté à un sujet de taux de change (cela vaut aussi bien pour les entreprises que pour les particuliers).
Heureusement, le niveau d’incertitude n’est pas aussi élevé concernant la trajectoire de la politique monétaire en zone euro. La Banque Centrale Européenne (BCE) a réagi comme on pouvait l’attendre. Elle a augmenté le loyer de l’argent dans l’Union de 25 points de base (c’était déjà intégré dans les prix offerts sur le FX). D’autres hausses de taux sont à venir, en particulier pour endiguer les pressions inflationnistes liées à un marché du travail marqué par un déséquilibre très important entre l’offre et la demande. Même en France, pays où le chômage structurel est traditionnellement élevé, le marché du travail est sur une dynamique très positive. Ne parlons pas de l’Europe du Sud. C’est presque un miracle économique qui est en train de se produire, en particulier au Portugal et en Grèce (même si dans le cas présent, on part de très bas). Le mouton noir est l’Allemagne. C’est inhabituel. C’est en grande partie lié à sa forte exposition à l’économie chinoise et au commerce mondial (qui envoie des signaux négatifs depuis le début de l’année).
Au cours de la semaine passée, la Chine a annoncé plusieurs mesures pour baisser le loyer de l’argent et accroître la liquidité dans le système économique. C’est positif. Mais c’est insuffisant. Tant que Pékin n’aura pas mis en œuvre des mesures de soutien directes au secteur de l’immobilier (qui est l’un des moteurs traditionnels de l’économie chinoise), il n’y aura pas de redressement durable. Cela signifie que la croissance mondiale devrait, dans tous les cas, être plutôt molle au deuxième semestre. C’est de nouveau négatif pour l’Allemagne.

Le point technique

Sur le marché des changes, l’euro a réagi plutôt positivement à l’issue de la réunion de la BCE (hausse de 1,64% de la paire EUR/USD sur la semaine passée, par exemple). Mais il n’est pas improbable que nous assistions à des prises de bénéfice dans les jours à venir. De notre point de vue, la réunion de la BCE n’a pas changé la donne sur la paire EUR/CHF. Nous sommes toujours positionnés à l’achat sur le franc suisse. Plusieurs facteurs devraient favoriser une baisse de l’EUR/CHF : CHF servant de valeur refuge face à l’entrée en récession de la zone euro (même s’il s’agit d’une récession de faible ampleur), balance courant de la Confédération helvétique qui sert de soutien au CHF, une valorisation qui est plutôt raisonnable si on réfléchit en termes de taux de change effectif réel. La réunion de la Banque Nationale Suisse (BNS) cette semaine ne devrait pas changer la donne. Nous restons aussi positionnés à l’achat sur le GBP en raison de l’ajustement du processus de hausse des taux au Royaume-Uni (nous allons en parler dans quelques lignes). Il est probable que l’EUR/GBP renoue avec la zone des 0,84-0,8440 à moyen terme.

Les supports et résistances affichés ci-dessous indiquent respectivement les points bas et hauts au sein desquels les cours devraient évoluer dans le courant de la semaine.

 SupportshebdoRésistanceshebdo
S2S1R1R2
EUR/USD1,06901,08301,10901,1120
EUR/GBP 0,84400,84900,8780 0,8891
EUR/CHF 0,95490,96900,98901,0045
EUR/CAD 1,41901,43401,46901,4730
EUR/JPY 146,40149,01156,90157,80

Les annonces à suivre

C’est une nouvelle semaine consacrée aux banques centrales (la pause estivale se rapproche toutefois). Il n’y a pas de grande surprise à attendre. Etant donné les derniers chiffres de l’emploi (qui confirment que les pressions salariales restent importantes) et les conséquences du Brexit (effet-prix négatif sur les importations, déséquilibres du marché du travail dans le secteur des services, en particulier pour les emplois à bas coût), la Banque d’Angleterre n’a pas d’autres choix que d’augmenter son taux directeur de 25 points de base cette semaine. C’est déjà attendu par tous les cambistes. D’autres hausses vont certainement être confirmées à l’avenir. Enfin, la BNS devrait aussi durcir sa politique monétaire (hausse de 25 points de base), comme l’a indiqué le gouverneur de la banque centrale la semaine dernière. La réunion prévue jeudi ne devrait pas provoquer beaucoup de volatilité sur l’EUR/CHF.

Vous trouverez ci-dessous les publications et événements qui devraient avoir un impact majeur sur l’évolution du cours des devises.

JourHeurePaysIndicateurÀ quoi s'attendre ?
Le 21/06/202308:00UKIndice des prix à la consommation (Mai)Précédent à 8,7 % en variation annuelle.
Le 22/06/202309:30SUIRéunion de la banque centraleHausse de 25 points de base.
Le 22/06/202313:00UKRéunion de la banque centrale Hausse de 25 points de base.

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