C’est compliqué

La lutte contre l’inflation n’est pas chose aisée. C’est ce qu’on retient des derniers chiffres portant sur l’inflation publiés aux Etats-Unis la semaine passée. En janvier, l’inflation (mesurée par l’indice des prix à la consommation) a atteint 6,4% en annuel. Certes, c’est le plus bas niveau depuis octobre 2021. Mais les analystes s’attendaient à une baisse plus importante (consensus à 6,2%). La baisse moins rapide que prévu s’explique par deux facteurs principaux. Premièrement, les Etats-Unis ont opéré un changement méthodologique afin de mesurer l’inflation. C’était prévu. A court terme, ce changement tend à surestimer les pressions inflationnistes. Deuxièmement, il ne faut pas nier que l’inflation ne reflue pas partout de la même manière. Si on s’intéresse au secteur des services et en particulier aux métiers qui nécessitent un recours important à de la main d’œuvre (qualifiée ou pas), tout indique que les pressions inflationnistes vont subsister. La hausse des prix en moyenne tend à converger vers 6,5-7% en annuel pour les avocats, les dentistes, les coiffeurs ou encore les crèches. C’est le signal évident qu’une partie de l’inflation ne va pas disparaître de sitôt. C’est ce qu’on appelle une inflation de long terme. Dans les années 1970, les Etats-Unis ont expérimenté trois pics d’inflation successifs. Pour l’instant, tout indique que le pic soit derrière nous (il a été atteint au cours de l’été 2022). Mais on sait que l’inflation est volatile et il suffit que les prix du baril de pétrole renouent avec les 100 dollars (contre moins de 80 dollars de nos jours) pour que cela se traduise par une nouvelle poussée de l’inflation. Comme nous ne cessons de le répéter depuis la fin de la période Covid, il faudra du temps (certainement des années !) avant de renouer avec des niveaux d’inflation plus tolérables (et on ne parle même pas de 2% en moyenne sur la longue durée mais plutôt de 3-4%).
Pour l’instant, la majorité des cambistes ne prévoit pas de changement au niveau de la politique monétaire américaine à la suite du chiffre de l’inflation. Le consensus table toujours sur deux hausses de taux de 25 points de base chacune puis une pause de politique monétaire à l’été prochain. Certaines banques internationales ont revu leurs prévisions toutefois. Goldman Sachs (qui a généralement un bon track-record pour prédire l’évolution de la politique monétaire américaine) anticipe désormais trois hausses de taux de 25 points de base chacune et un taux terminal qui se situe autour de 5,25-5,50%. En fonction des chiffres de l’inflation qui seront publiés dans les semaines à venir, il n’est pas improbable que le consensus évolue. Pour l’instant, ce qui est certain, c’est que la Réserve Fédérale américaine (Fed) va augmenter son taux directeur de 25 points de base le mois prochain. Elle possède une grande latitude pour durcir le loyer de l’argent. Jusqu’à présent, le ralentissement économique en cours aux Etats-Unis n’a eu aucun impact sur le chômage (qui est au plus bas depuis 1969) et sur la consommation malgré une faible épargne (les ventes au détail affichent une performance qui a de quoi surprendre !). C’est une période inédite. La perspective d’une récession, qui était si souvent évoquée en fin d’année dernière, n’est désormais plus qu’un lointain souvenir. Evidemment, c’est une bonne nouvelle pour tout le monde.
Du côté européen, la situation n’a pas changé. Il n’y avait aucune statistique importante la semaine dernière. Le marché monétaire prévoit que la Banque Centrale Européenne (BCE) va continuer d’augmenter ses taux, jusqu’à un taux terminal situé à 3,75%. Celui-ci pourrait être atteint à la fin de l’été (en septembre prochain), à en croire le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau. Là encore, l’ampleur de la hausse des taux pour le mois de mars ne fait pas de doutes. Isabel Schnabel, un membre très écouté du directoire de la BCE, a indiqué en fin de semaine dernière que dans tous les scénarios possibles et inimaginables, la prochaine hausse de taux sera de 50 points de base en zone euro. Au moins, c’est dit. Ce qui est certain, c’est que cela n’a pas aidé l’euro face au dollar américain.

En effet, la monnaie unique européenne a continué de perdre du terrain face au billet vert (-0,10% en variation hebdomadaire). On a toutefois observé des achats spéculatifs lors de la séance de vendredi lorsque l’EUR/USD a atteint la zone des 1,0610. Malgré les déboires récents de la paire, nous sommes toujours positionnés à la hausse avec un objectif autour des 1,0950 (à moyen terme). L’euro apparaît en revanche en bonne position face à ses autres contreparties (hausse face à la livre sterling, au dollar canadien, et au yen japonais par exemple). L’euro a effectué une poussée de plus de 2% en variation hebdomadaire face au yen japonais. Les cambistes se positionnent à l’achat alors que l’éventualité d’une normalisation de la politique monétaire japonaise s’éloigne de nouveau. On peut avoir un peu de volatilité sur la paire EUR/JPY cette semaine, en particulier le 24 février lorsque l’audition du nouveau gouverneur de la Banque du Japon (BoJ) aura lieu face au parlement japonais (c’est une formalité, il est assuré d’obtenir le poste). Ce sera l’occasion d’en savoir un peu plus sur la politique monétaire que souhaite mener cet illustre inconnu. Tous les experts considèrent qu’à ce stade il devrait simplement s’inscrire dans la continuité de ce qui a été fait par la BoJ ces dernières années. Si c’est le cas, c’est négatif pour le yen japonais.

Les supports et résistances affichés ci-dessous indiquent respectivement les points bas et hauts au sein desquels les cours devraient évoluer dans le courant de la semaine.

 SupportshebdoRésistanceshebdo
S2S1R1R2
EUR/USD1,05081,05951,07871,0888
EUR/GBP 0,86100,87400,89420,9009
EUR/CHF 0,96300,97300,99661,0034
EUR/CAD 1,41691,42871,45131,4690
EUR/JPY 139,90141,24145,76149,80

+33 (0)1 48 09 09 83

Cette semaine, nous doutons que le compte-rendu de la dernière réunion de la Fed soit d’un grand intérêt. La réunion a eu lieu avant la publication du dernier chiffre de l’inflation. En revanche, il faudra regarder d’un œil la publication de l’indice PCE core pour le mois de janvier (consensus : hausse de 0,4% en mensuel). C’est une des mesures de l’inflation qui est surveillée de près par la Fed car elle permet, même si elle est publiée avec un certain décalage temporel, d’observer les tensions inflationnistes plus persistantes. C’est donc un indicateur important pour différencier l’inflation conjoncturelle (qui est amenée à se dissiper) et l’inflation structurelle (qui va rester). Du côté allemand, les chiffres pour le mois de février devraient confirmer que le risque de récession s’éloigne. Mais nous le savions déjà (en tout cas, si vous prenez le temps de nous lire chaque semaine).

Vous trouverez ci-dessous les publications et événements qui devraient avoir un impact majeur sur l’évolution du cours des devises.

JourHeurePaysIndicateurÀ quoi s'attendre ?
Le 21/02/202311:00ALLIndice ZEW du sentiment économique (Février)Hausse à 22,0 contre 16,9 en janvier. Le spectre de la récession s’éloigne.
Le 22/02/202310:00ALLIndice IFO du climat des affaires (Février) Hausse à 91,4 contre 90,2 en janvier. Encore un signal positif !
Le 22/02/202320:00USACompte-rendu de la dernière réunion de la FedConfirmation probable que deux autres hausses de taux sont à venir, au moins.
Le 23/02/202314:30USAIndice PCE core (Janvier)Hausse à 0,4% en mensuel contre 0,3% en décembre.

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