La volatilité sur le marché des changes reste contenue pour le moment. Mais il faudra être très vigilant à propos de l’évolution des banques régionales américaines. Nous ne sommes pas face à un scénario à la Lehman Brothers. En revanche, la spéculation contre ces entités qui sont une clé de voûte majeure du système financier américain pourrait, si elle perdure, entraîner des conséquences négatives sur tous les marchés financiers, y compris le marché des changes. Un seul mot : vigilance.
Il y a des semaines plus difficiles que d’autres. Il faut bien reconnaître que ce qui se passe de l’autre côté de l’Atlantique n’est pas sans rappeler la crise de 2007-08. L’effondrement des banques régionales américaines, même si cela est sans commune mesure avec la dernière crise financière, va durablement impacter négativement l’économie américaine via une réduction de l’octroi de crédits dans un contexte de taux élevés. Cela ne signifie pas obligatoirement que l’économie américaine va entrer en récession. Par le passé, ce ne fut pas systématiquement le cas dans une situation similaire. Mais il est évident que cela complique la tâche des autorités, en particulier de la Réserve Fédérale (Fed). Presque chaque semaine, une nouvelle banque régionale doit être secourue. A ce stade, sur 349 banques régionales américaines, seulement une douzaine sont réellement au bord du précipice. Mais on sait très bien que les phénomènes de panique sont difficiles à endiguer c’est pourquoi les autorités doivent faire preuve de diligence afin de gérer au cas par cas les problèmes de chaque banque. La situation est indéniablement inquiétante. En janvier dernier, la capitalisation totale des banques régionales américaines cotées était de 475 milliards de dollars. Aujourd’hui, c’est l’équivalent de 100 milliards de dollars. Cela équivaut à une baisse de 78% en l’espace de seulement quatre mois. Cela traduit parfaitement la panique autour de cet acteur clé du système bancaire américain, notamment sur le créneau des prêts commerciaux.
C’est d’ailleurs la situation des banques régionales américaines qui a incité la Fed à faire une pause dans sa politique de hausse des taux, pour éviter d’accentuer les tensions financières. Comme prévu, la banque centrale a une dernière fois augmenté son taux directeur principal de 25 points de base dans la borne comprise entre 5% et 5,25%. Mais aucune nouvelle hausse de taux n’est prévue par la suite. Il n’y a pas le choix. Il faut d’abord stabiliser le secteur financier avant de s’occuper de l’inflation. Cette dernière est heureusement en repli. Seul bémol : l’inflation au niveau des services ne reflue pas. Il est probable que la Fed aurait souhaité, dans un monde idéal, augmenter encore un peu les taux pour s’assurer que les pressions inflationnistes refluent durablement. Il n’y a pas si longtemps que cela, les marchés avaient prévu un taux terminal proche de 6%. Ce sera 5,25% finalement, en raison des difficultés bancaires. Le marché monétaire prévoit également que la Fed va être contrainte rapidement de desserrer l’étau au niveau des conditions financières en baissant les taux. La première baisse des taux est prévue pour le mois de septembre prochain. A ce stade, il ne faut pas prêter trop attention à ces projections qui fluctuent en fonction des commentaires des membres du FOMC et des données économiques. Tout au plus, cela montre que le marché ne croit pas du tout à une nouvelle hausse des taux.
De l’autre côté de l’Atlantique, l’enjeu pour la Banque Centrale Européenne (BCE) était moindre. Même si l’institution a formellement abandonné le forward guidance pour une approche au cas par cas en fonction des statistiques, elle n’avait jamais fait mystère de sa volonté d’augmenter de nouveau les taux directeurs. La hausse a été de 25 points de base (contre 50 points de base lors des dernières réunions). D’autres hausse devraient suivre selon la présidente de la BCE, Christine Lagarde. Le consensus des économistes prévoit au moins une nouvelle augmentation du loyer de l’argent d’ampleur similaire au mois de juin. La situation économique et financière est différente en zone euro, ce qui donne une marge de manœuvre plus importante à la BCE. L’inflation reflue plus lentement qu’aux Etats-Unis, d’où la nécessité de durcir davantage la politique monétaire à court terme. En revanche, comme c’est le cas pour nos amis américains, le problème est surtout concentré sur l’inflation au niveau des services qui reste élevée. En outre, pour l’instant, le durcissement des conditions financières n’entraîne pas de dommages collatéraux. L’octroi de prêts diminue mais c’est inévitable (c’est d’ailleurs un effet recherché de la hausse des taux). Mais le secteur bancaire est parfaitement stable et ne fait pas l’objet d’une quelconque spéculation, contrairement à ce qui se passe aux Etats-Unis. Même dans les pays qui étaient considérés à risque il y a quelques années de cela, comme l’Italie ou la Grèce, il n’y a aucune tension palpable sur les banques. C’est une bonne nouvelle.
Le point technique
Sur le marché des changes, la paire EUR/USD a fait l’objet de prises de profit en fin de semaine (d’où la dépréciation de 0,96%). Elle continue d’évoluer autour de la zone psychologique située autour de 1,10. Le marché manque de dynamisme et les investisseurs ont besoin de nouveaux arguments pour aller plus haut. Le différentiel de politique monétaire et de taux entre les Etats-Unis et la zone euro n’est plus suffisant. Nous pensons que dans les prochaines semaines, l’EUR/USD devrait continuer d’évoluer proche de 1,10, sans réelle capacité à franchir la zone de résistance située à 1,1090 (c’est le seuil à la hausse qu’il faut surveiller). Pour les autres paires, nous n’observons pas de changement de tendance. Tout se passe comme prévu : biais baissier pour l’EUR/CHF, biais haussier pour l’EUR/JPY et l’EUR/CAD, et situation de range pour l’EUR/GBP.
Les supports et résistances affichés ci-dessous indiquent respectivement les points bas et hauts au sein desquels les cours devraient évoluer dans le courant de la semaine.
Supports | hebdo | Résistances | hebdo | |
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S2 | S1 | R1 | R2 | |
EUR/USD | 1,0740 | 1,0866 | 1,1090 | 1,1166 |
EUR/GBP | 0,8567 | 0,8668 | 0,9000 | 0,9092 |
EUR/CHF | 0,9520 | 0,9692 | 0,9934 | 1,0050 |
EUR/CAD | 1,4437 | 1,4614 | 1,5024 | 1,5181 |
EUR/JPY | 144,38 | 146,13 | 150,62 | 153,35 |
Les annonces à suivre
En théorie, la publication des chiffres de l’inflation aux Etats-Unis devrait être le point d’orgue de la semaine sur le marché des changes. Mais comme la Fed a décidé d’entamer une pause de politique monétaire, il est peu probable que la première estimation des prix à la consommation au mois de mai ait un réel impact sur les devises. En revanche, il faudra être très vigilant concernant l’évolution des banques régionales américaines. Pour l’instant, le marché des changes a finalement assez peu réagi. Tout au plus, cela a accentué la baisse du Dollar Index (mais d’autres facteurs plus importants jouent également). En revanche, si la panique n’est pas endiguée, il n’est pas exclu que cela entraîne des répercussions plus importantes sur les marchés financiers qui puissent aller au-delà des marchés actions. Cela pourrait notamment provoquer des remous sur les devises. D’où la nécessité de surveiller de près ce segment de marché fragile dans les semaines à venir.
Vous trouverez ci-dessous les publications et événements qui devraient avoir un impact majeur sur l’évolution du cours des devises.
Jour | Heure | Pays | Indicateur | À quoi s'attendre ? |
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Le 10/05/2023 | 14:30 | USA | Indice des Prix à la Consommation (Avril) | Ce sera l’une des principales statistiques de la semaine. Hausse à 5,2% en variation annuelle contre 5,0% précédemment. |
Le 11/05/2023 | 13:00 | UK | Réunion de la banque centrale | Hausse du taux directeur de 0,25% à 4,50%. |
Le 12/05/2023 | 08:00 | UK | PIB au premier trimestre | Précédent à 0,1%. |
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