C’est toujours tendu

Pendant longtemps, le marché des changes a été hermétique à l’accroissement du risque géopolitique en Ukraine. Le point de rupture fut atteint le jeudi 24 février lorsque l’armée russe a attaqué l’Ukraine sur trois fronts (au nord depuis la Biélorussie, au sud depuis la Crimée et à l’est depuis le Donbass). Dans la foulée, l’euro a perdu presque 200 points face au dollar américain (avec un point bas à proximité de 1,1110) et environ 210 points face au yen japonais (avec un point bas à 127,90). Trois raisons expliquent la forte réaction initiale du marché : 1) pendant des semaines les experts en géopolitique ont affirmé qu’une invasion totale de l’Ukraine était exclue (l’effet de surprise explique la forte baisse de l’euro) ; 2) rapidement les cambistes se sont inquiétés des potentielles conséquences économiques et financières (hausse de l’inflation et baisse possible de la croissance en zone euro) et 3) beaucoup craignent que la Russie ait des visées impérialistes et expansionnistes sur d’autres pays (Géorgie et Moldavie en particulier), ce qui ferait que le risque géopolitique soit un facteur de perturbation durable pour les devises. Une fois l’effet de surprise passé, le marché des changes a retrouvé un semblant de normalité lors de la séance de vendredi dernier. Mais ce fut de courte durée puisque le marché a renoué avec la volatilité dès les échanges asiatiques pendant la nuit de dimanche à lundi. Les cambistes ont intégré les nouvelles du week-end : envoi d’armes par l’Union Européenne à l’Ukraine, interdiction d’accès des avions russes civiles et militaires à l’espace aérien européen, sortie partielle de plusieurs banques russes du système d’authentification des transactions Swift et sanctions contre la banque centrale russe. En représailles, le président russe Vladimir Poutine a annoncé mettre les forces armées en alerte maximale, y compris les forces armées nucléaires. Il envisagerait aussi de nationaliser les actifs en Russie d’acteurs étrangers appartenant à des pays soutenant l’Ukraine (à titre d’exemple, cela pourrait être le cas la de Société Générale qui a une filiale en Russie). Une nouvelle escalade des tensions semble inévitable à court terme. On sait que les Européens souhaitent élargir la liste des personnalités russes sanctionnées. Tout porte à croire que la volatilité va encore rester importante dans les heures et les jours à venir, c’est pourquoi il faudra adopter la bonne stratégie de couverture – notre équipe se tient à votre disposition à ce sujet.
Il est trop tôt pour comprendre en détail les implications économiques de la situation en Ukraine. Il semble toutefois probable qu’à court terme cela aboutisse à une forte hausse des prix de l’énergie et, par ricochet, de l’inflation. Le baril de pétrole a franchi le niveau psychologique des 100 dollars la semaine dernière. Tous les experts s’accordent à dire que cette hausse est durable. Vendredi dernier, l’indice des prix à la consommation en France pour février a fortement rebondi à 4,1% en variation annuelle contre une estimation initiale à 3,7%. C’est sans tenir compte de la forte hausse des prix de l’énergie au cours des derniers jours. L’indice des prix à la consommation pour le mois de mars (qui ne sera publié qu’en avril prochain) risque d’être douloureux. L’augmentation notable des prix de l’énergie va compliquer la tâche des banques centrales dans les semaines et les mois à venir. Il y a quelques jours de cela, le consensus des analystes tablait sur une première hausse des taux de la Réserve Fédérale américaine de 50 points de base en mars. Ce n’est plus certain. Même chose pour la Banque Centrale Européenne. Cette dernière pourrait décider de retarder un peu la phase de normalisation de sa politique monétaire afin de pouvoir juger de l’impact économique de la situation en Ukraine. Nous sommes entrés dans une période d’incertitude à cause du risque géopolitique.

Sur le marché des changes, l’analyse technique indique que la tendance est toujours baissière pour l’EUR/USD. Nous ne serions pas surpris, au regard de l’aversion au risque qui persiste, de voir la paire atteindre les 1,1040 dans les jours à venir. Il faudrait un franchissement de la zone des 1,16 pour que la paire renoue avec une tendance haussière. C’est évidemment un objectif lointain. La tendance est également baissière pour l’EUR/JPY. Dans les échanges asiatiques cette nuit, la paire évoluait autour du niveau des 128,00. Si la baisse se poursuit, le prochain objectif se situe à 126,67 qui fait office de support. On sait que le yen japonais joue parfaitement son statut de valeur refuge en période de fortes perturbations politiques.

Les supports et résistances affichés ci-dessous indiquent respectivement les points bas et hauts au sein desquels les cours devraient évoluer dans le courant de la semaine.

 SUPPORTSHEBDORÉSISTANCES HEBDO
S2S1R1R2
EUR/USD1,09301,10401,15291,1600
EUR/GBP 0,81650,82660,84270,8467
EUR/CHF 1,01801,02021,05781,0776
EUR/CAD 1,39541,41681,45901,4800
EUR/JPY 123,47126,67131,24132,54

+33 (0)1 48 09 09 83

C’est évident que le risque géopolitique va être encore un facteur important à prendre en considération dans les échanges ces prochaines séances. La thématique de l’inflation va aussi revenir sur le devant de la scène à la faveur de la publication de la première estimation de l’indice des prix à la consommation en zone euro pour le mois de février. Le consensus des analystes anticipe une baisse à 4,4% sur un an contre 5.0% en janvier dernier. Mais, au regard du chiffre français que nous avons évoqué plus haut, une mauvaise surprise n’est pas exclue. L’inflation pourrait encore accélérer. Cela pourrait entrainer un peu de remous sur les paires en euro dans la foulée de la publication. L’emploi américain est toujours un indicateur important. A moins que le chiffre final soit très éloigné du consensus (400 000 créations d’emplois prévues en février), cela ne devrait pas avoir beaucoup d’effet sur les taux de change sur les paires en USD.

Le maître mot cette semaine : prudence.

Vous trouverez ci-dessous les publications et événements qui devraient avoir un impact majeur sur l’évolution du cours des devises.

JOURHEUREPAYSINDICATEURA QUOI S'ATTENDRE ?
01/0316:00Indice ISM manufacturier (Février)Hausse à 58,0 contre 57,6 précédemment.
02/0311:00Indice des prix à la consommation (Février)C’est un indicateur important qui va conditionner l’action de la BCE. Le consensus table sur une baisse à 4,4% sur un an contre 5,0% en janvier.
14:15Créations d’emplois non agricoles – ADP (Février)Fort rebond prévu par le consensus des analystes à 328 000 contre -301 000 en janvier (ce dernier chiffre est susceptible d’être révisé).
03/0316:00Indice ISM non manufacturier (Février)Progression attendue à 61,0 contre 59,9 précédemment.
04/0314:30Rapport sur l’emploi du Département du Travail (Février)Le taux de chômage devrait de nouveau reculer à 3,9% (contre 4.0% en janvier) et les créations d’emplois sont attendues plutôt stables à 400 000.

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