Pas de quoi se réjouir

L’environnement économique continue de se dégrader. La Banque mondiale a publié ses nouvelles projections économiques la semaine dernière. C’est une baisse importante qui est attendue de la croissance mondiale cette année. En janvier, l’organisation internationale tablait sur une hausse du PIB de 4,1%. Ce ne sera que 2,9% finalement. Il est probable que cette dernière estimation soit révisée à la baisse dans les mois à venir. L’organisation a aussi tiré la sonnette d’alarme concernant un risque de dette souveraine touchant les pays en voie de développement (qui ne sont pas en mesure de faire face à l’explosion du coût des denrées alimentaires et des prix de l’énergie). Le Sri Lanka a été le premier pays à faire défaut. Nous vous en parlions il y a quelques semaines de cela. D’autres vont suivre, probablement en Asie et en Afrique. Le risque systémique pour les pays développés est faible, heureusement.

En Europe, l’économie ralentit. L’OCDE a publié des estimations inquiétantes de baisse du salaire réel (salaire nominal retranché de l’inflation). Quasiment tous les pays européens risquent de connaître une baisse des salaires réels, parfois dans des amplitudes importantes. En Grèce, la baisse pourrait atteindre 7% cette année. Ce n’est pas sans rappeler ce qui s’est produit immédiatement après la crise financière de 2007-2008. La France fait figure d’exception. Selon l’organisation internationale, les salaires réels devraient augmenter très marginalement de 0,24% en moyenne cette année (la hausse des salaires nominaux est légèrement supérieure à la progression de l’inflation). Encore une fois, il s’agit d’une estimation. Si l’inflation grimpe davantage, comme nous l’anticipons, il est probable que les salaires réels vont chuter en France aussi. La consommation risque de tanguer en Europe à partir de la rentrée de septembre. Ce sera un test de réalité brutal pour les consommateurs mais aussi pour les entreprises. Il est vraisemblable que le gouvernement soit contraint de dévoiler un plan « pouvoir d’achat » plus ambitieux que celui qui a été présenté la semaine dernière.

De l’autre côté de la Manche, les indicateurs confirment que le risque de fort ralentissement économique voire de récession s’accentue. L’indice d’activité pour le secteur de la construction (qui est un indicateur important pour juger de l’état réel de l’économie) s’est effondré à un point bas depuis le mois de janvier. La stagnation observée dans la construction d’immeubles et de maisons résidentielles est le point le plus préoccupant. C’est le signe que la flambée du coût de la vie conjuguée à la hausse des taux d’intérêt (en lien avec le durcissement monétaire enclenché par la Banque d’Angleterre) commence à peser sur la demande. Un plus fort ralentissement du secteur est prévu à court et à moyen terme.
Aux Etats-Unis, l’inflation continue de progresser à un rythme de 8,6% en variation annuelle en mai (6% si on omet les éléments volatils). Cela semble confirmer que le pic d’inflation n’a pas été atteint (ce que nous pensions déjà chez Mondial Change). La Réserve Fédérale américaine (Fed) va devoir convaincre le marché des changes de sa détermination à lutter contre la flambée des prix. Dans une récente étude qui a fait le tour des médias, l’économiste Larry Summers, ancien secrétaire du Trésor américain sous l’ère Clinton, estime que le niveau d’inflation actuel est supérieur à celui observé pendant les pics des années 1950 et du début des années 1970 si on ajuste les taux d’inflation historiques en prenant en compte les modifications qui ont affecté le panier de mesure de l’indice des prix. C’est effrayant. En conclusion, il appelle la Fed à réagir plus agressivement en adoptant une approche similaire à celle mise en œuvre par Paul Volcker, président de la Fed, au début des années 1980. Il avait augmenté très abruptement les taux, faisant refluer avec succès l’inflation. Au passage, cela avait poussé l’économie américaine en récession à deux reprises (récession de très courte durée à chaque fois). Il est certainement encore trop tôt pour qu’un tel remède soit employé.

Sur le marché des changes, l’euro s’inscrit toujours en baisse face au dollar américain (-0,85% sur cinq séances). Le ton hawkish de la Banque Centrale Européenne et la perspective d’une hausse du taux directeur de 25 points de base en juillet prochain (déjà intégrée dans les cours depuis mi-mai) n’ont pas convaincu les cambistes. L’analyse technique confirme toujours que la tendance baissière prévaut à moyen terme. Le seuil stratégique à surveiller dans les séances à venir pour l’EUR/USD est la zone de support située autour des 1,0500-1,0503. En cas de cassure, il faut s’attendre à une dépréciation plus accentuée, en direction des 1,0350. Nous pensons qu’un retour vers la parité (qui continue d’être évoqué par beaucoup d’analystes Forex) est un scénario un peu prématuré. Plusieurs niveaux techniques majeurs doivent être franchis avant cela.

Les supports et résistances affichés ci-dessous indiquent respectivement les points bas et hauts au sein desquels les cours devraient évoluer dans le courant de la semaine.

 SUPPORTSHEBDORÉSISTANCES HEBDO
S2S1R1R2
EUR/USD1,03401,05031,08291,0993
EUR/GBP 0,83200,84200,86330,8739
EUR/CHF 1,01201,01961,05001,0610
EUR/CAD 1,31201,33141,36361,3797
EUR/JPY 137,59139,77145,32146,21

+33 (0)1 48 09 09 83

La volatilité sera certainement importante cette semaine sur les principales paires du marché des changes en raison des nombreuses réunions de banque centrale. La Banque Nationale Suisse (BNS) ne devrait pas modifier sa politique monétaire pour l’instant. Mais elle devrait ouvrir la porte à un ajustement prochain – certainement dans la foulée de la BCE. La BNS a fait part de son inquiétude concernant l’évolution de l’inflation ces dernières semaines et a laissé entendre qu’elle pourrait progressivement sortir de sa politique de taux négatifs (qui est une anomalie). Outre-Atlantique, la direction de la politique monétaire est limpide pour les mois à venir : hausse de 50 points de base cette semaine, avant une action similaire en juillet. Il est encore trop tôt pour savoir si la Fed va opter pour une pause dans le cycle de durcissement en septembre (scénario évoqué par beaucoup d’analystes). Il faudra avoir plus de données sur l’évolution de l’inflation et du marché de l’emploi pour avoir un avis ferme. Enfin, la Banque d’Angleterre sera sous les projecteurs cette semaine également. Bien qu’elle ait fait part de son inquiétude concernant la dynamique de croissance, il est peu probable qu’elle décide de stopper son processus de normalisation monétaire à ce stade. Le marché des changes prévoit à une large majorité une hausse du taux directeur de 25 points de base ce jeudi. C’est déjà en partie intégré dans le taux de change de la livre sterling.

Vous trouverez ci-dessous les publications et événements qui devraient avoir un impact majeur sur l’évolution du cours des devises.

JOURHEUREPAYSINDICATEURA QUOI S'ATTENDRE ?
14/0611:00Indice ZEW du sentiment économique (Juin)Forte baisse prévue à -42,0 contre -34,3 en mai – ce qui renforce les risques de stagflation en Allemagne.
14:30Prix à la production (Mai)Nouvelle progression en variation mensuelle attendue à 0,8% contre 0,5% en avril.
15/0620:00Réunion de la banque centrale Le consensus des analystes prévoit une hausse du taux directeur de 50 points de base. Cela fait peu de doutes. A noter que les projections économiques seront mises à jour, à cette occasion.
16/0609:30Réunion de la banque centraleAucun changement de politique monétaire à court terme. Mais la banque centrale devrait confirmer se tenir prête à augmenter son taux directeur si l’inflation continue d’augmenter. C’est un changement majeur pour la Suisse.
13:00Réunion de la banque centraleUne majorité d’analystes prévoit que le taux directeur augmente de 25 points de base.

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