Six lettres

S’il y a un seul message qu’il faut retenir de la semaine dernière, c’est que les banques centrales vont continuer d’augmenter leurs taux directeurs pour lutter contre l’inflation persistante, et certainement dans des proportions qui sont plus importantes que prévues par les marchés financiers. Il y a encore quelques années de cela, la politique monétaire était un élément de stabilité des marchés. Ce n’est désormais plus le cas. Il est difficile de savoir ce que va faire la BCE dans trois mois. Cela induit potentiellement des pics de volatilité sur le Forex qui ne sont pas toujours bien anticipés par les cambistes.

Sintra. C’est une ville moyenne au Portugal (environ 370 000 habitants) qui est située à environ 25 kilomètres au nord-ouest de Lisbonne. Il y a plusieurs activités à faire : visiter le palais national de Pena qui est tout en couleurs, le château des Maures et ses fortifications impressionnantes ou encore découvrir les petits villages, parfois au bord de la mer, qui sont à quelques kilomètres de la ville. Et puis, chaque année, c’est un rituel, la Banque Centrale Européenne (BCE) organise sa grande rencontre qui réunit les banquiers centraux des principales économies mondiales. Habituellement, cet évènement suscite assez peu l’intérêt des marchés financiers (à l’inverse du fameux symposium de Jackson Hole aux Etats-Unis à la fin du mois d’août). Il est rare qu’il y ait des annonces importantes. Cette année, c’est différent toutefois. En effet, si les cambistes avaient encore des doutes après les dernières décisions de politique monétaire, il ne peut désormais plus en avoir : le cycle de durcissement monétaire va continuer. C’est un phénomène global (à quelques exceptions près). Nous avons listé pour vous les banques centrales qui sont les plus hawkish (c’est-à-dire celles qui ont clairement indiqué qu’il faut augmenter davantage le loyer de l’argent pour lutter contre l’inflation). Par ordre croissant, on retrouve la Banque du Japon, la Réserve Fédérale américaine (Fed), la BCE et la Banque d’Angleterre (BoE). Foncièrement, il n’y a pas de grande surprise. On savait déjà que des hausses de taux supplémentaires auront lieu. Toutefois, nous n’étions certainement pas préparés à un ton aussi hawkish. Prenons l’exemple de la BCE. Christine Lagarde, sa présidente, a non seulement indiqué que le pic d’inflation n’est probablement pas encore atteint en zone euro (c’est un retour en arrière par rapport à ses interventions ultérieures) mais qu’en plus il va falloir peut-être aller au-delà des attentes du marché pour juguler l’inflation. Elle a notamment mis l’accent sur la croissance des salaires qui est, selon elle, un nouveau relais de l’inflation dans l’Union. S’ajoute à cela des tensions récentes sur l’énergie (en particulier les prix du gaz et de l’électricité) qui confirment que la crise énergétique n’est certainement pas totalement terminée. Le discours du président de la Fed, Jerome Powell, est allé dans le même sens. Il a souligné qu’il y a encore beaucoup d’incertitudes et d’incohérences statistiques concernant l’état réel de l’économie post-Covid. Par exemple, c’est assez surprenant que la confiance des ménages américains se porte aussi bien en période de forte inflation (même s’il y a eu des mesures redistributives pour compenser en partie la hausse générale des prix). Alors que tout le monde ou presque attend une récession aux Etats-Unis (ce qui serait logique en termes de cycle économique et au regard de l’évolution des flux de crédit entrant dans l’économie), les indicateurs publiés la semaine dernière ne vont pas du tout dans ce sens-là. Les ventes de maisons neuves ont augmenté le plus rapidement en l’espace d’un an selon les dernières données. Les prix immobiliers ont connu une hausse pour le troisième mois consécutif. Les commandes de biens durables dépassent les attentes. Enfin, la confiance du consommateur est à ses points hauts de 2022. C’est surprenant. C’est déroutant même. Il semble de plus en plus évident que l’économie post-Covid est plus résiliente qu’il n’y paraît. C’est un vrai défi pour les banquiers centraux puisque la force de la demande constitue un facteur aggravant évident des tensions inflationnistes. Pour une banque centrale, il n’y a pas beaucoup d’outils actionnables. Le seul moyen pour lutter contre la hausse des prix, c’est d’augmenter le loyer de l’argent. Il n’est donc pas improbable que les attentes en termes de hausses des taux dans les grandes économies mondiales soient sous-estimées cette année (est-ce que la Fed va augmenter ses taux en juillet mais aussi en septembre prochain ?). Ce qui est certain à ce stade, c’est qu’il n’y aura pas de baisse des taux cette année aux Etats-Unis, à l’inverse de ce que le consensus de marché avait anticipé (première baisse des taux prévue en novembre prochain). L’incertitude au niveau de la politique monétaire va, évidemment, entraîner des répercussions sur le marché des changes à moyen terme. Pour l’instant, les opérateurs tablent sur une phase de dépréciation du dollar index à partir de la rentrée. Ce n’est en rien certain. D’où l’importance d’adopter une stratégie de couverture qui soit pertinente.

Le point technique

Sur le marché des changes, l’EUR/USD reste en territoire positif en variation annuelle mais la paire a perdu beaucoup de terrain face à un dollar américain renforcé en raison des perspectives de hausses de taux de la Fed. Nous estimons que la paire pourrait évoluer dans un grand range au cours du deuxième semestre entre 1,0500 et 1,1250. Il sera certainement difficile d’atteindre le pic attendu par les trésoriers à 1,15. Pour l’instant, l’euro manque de catalyseur à la hausse. En revanche, l’euro continue d’afficher une solide performance face à la couronne suédoise (SEK). Cette dernière a atteint un nouveau point bas face à la monnaie unique. Depuis le début de l’année, l’EUR/SEK a augmenté de plus de 5%. Le potentiel haussier n’est certainement pas encore terminé. Nous avons une cible à 12,00 contre 11,80 actuellement. Les déboires économiques de la Suède continuent de peser lourdement sur la devise nationale. Enfin, la tendance est toujours positive pour l’euro face au yen japonais (hausse déjà de plus de 12% depuis le mois de janvier). Il faut toutefois faire attention à de possibles prises de bénéfices. Ce serait logiquement après une telle progression.

Les supports et résistances affichés ci-dessous indiquent respectivement les points bas et hauts au sein desquels les cours devraient évoluer dans le courant de la semaine.

 SupportshebdoRésistanceshebdo
S2S1R1R2
EUR/USD1,06201,06991,09901,1150
EUR/GBP 0,83890,84340,87800,8904
EUR/CHF 0,95100,96200,99091,0025
EUR/CAD 1,41501,42991,45991,4680
EUR/JPY 151,99154,50159,10160,00

Les annonces à suivre

C’est une semaine américaine qui débute. Beaucoup d’indicateurs sont à l’agenda mais la réalité c’est que seul le rapport sur l’emploi du Département du Travail américain (publication vendredi) aura réellement un impact sur les devises. C’est une publication suivie de près par les cambistes qui crée de la volatilité sur les paires en USD. Les dernières publications sur le marché du travail américain ont eu tendance à confirmer que la dynamique est très positive (même trop positive). Cela laisse les mains libres à la Fed pour augmenter ses taux. Si c’est encore le cas cette semaine, il faut s’attendre à ce que la réunion prochaine de la Fed en juillet prochain aboutisse, sans l’ombre d’un doute, à une nouvelle augmentation du loyer de l’argent d’au moins 25 points de base. En théorie, c’est un élément de soutien du dollar américain.

Vous trouverez ci-dessous les publications et événements qui devraient avoir un impact majeur sur l’évolution du cours des devises.

JourHeurePaysIndicateurÀ quoi s'attendre ?
Le 03/07/202316:00USACréations d’emplois non agricoles ADP (Juin)Précédent à 278k.
Le 06/07/202314:15USAConfiance des consommateurs du Conference Board (Juin)Hausse de 25 points de base.
Le 06/07/202316:00USAIndice ISM non manufacturier (Juin) Précédent à 50,3.
Le 07/07/202314:30USARapport sur l’emploi américain du Département du Travail (Juin)Taux de chômage à 3,7% et créations d’emplois à 339k en mai.

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