Solutions magiques

Commençons par une bonne nouvelle : la crise de l’énergie sera peut-être un peu moins aiguë que prévu. Les prix de gros du gaz naturel pour livraison dans un mois ont chuté de près de 10% la semaine dernière alors que les stocks européens sont au plus haut (ce qui devrait logiquement permettre d’éviter des pénuries au cœur de l’hiver). En outre, l’Allemagne a joué la carte du bon sens en décidant de prolonger de quelques mois la durée de vie de trois de ses centrales nucléaires restantes, jusqu’au printemps prochain. Cela devrait permettre de passer l’hiver sans trop d’encombres. Il n’en reste pas moins que la facture d’électricité a considérablement augmenté, en particulier pour les TPE/PME (qui, rappelons-le, constituent 95% de l’emploi en France). Selon les chiffres de la CPME (Confédération des Petites et Moyennes Entreprises), près de 150 000 entreprises françaises font face à un risque sérieux de faillite. Pour l’instant, les faillites d’entreprises sont encore proches de leur point bas (autour de 34 000 en variation annuelle selon les dernières données. Comme nous l’avons souvent souligné ici, la crise de l’énergie est durable (cela va prendre plusieurs années pour créer de nouvelles infrastructures qui ne soient pas dépendantes de la Russie). Jusqu’à présent, les pouvoirs publics en Europe n’ont pas toujours été à la hauteur. Les aides aux ménages et aux entreprises sont bienvenues. Mais c’est une solution de court terme. Ils privilégient trop souvent des solutions magiques comme les achats groupés de gaz et la sobriété heureuse pour régler des problèmes de long terme. C’est insuffisant. Ce qu’il faut faire, c’est certainement revoir notre mix énergétique et investir dès à présent. Du point de vue macroéconomique, cela signifie qu’il faudra certainement s’habituer à des factures énergétiques durablement plus élevées qu’avant la Covid. La crise ne va pas disparaître en 2023.
De l’autre côté de la Manche, le chaos continue. La situation politique ressemble de plus en plus à ce qu’on peut voir dans certains pays émergents. Le Premier ministre Liz Truss a été poussé à la démission. C’est le mandat le plus court de l’histoire britannique : 45 jours. Truss est restée plus longtemps en campagne pour être premier ministre qu’en poste. A titre de comparaison, la durée de son mandat équivaut à la gestation d’une musaraigne à trompe (magnifique petit mammifère qu’on retrouve en Afrique). Son successeur devrait être connu d’ici la fin de la semaine. C’est sidérant. S’ajoute à cela le fait que l’inflation poursuit son ascension. L’indice des prix à la consommation a atteint 10,1% en variation annuelle en septembre (c’est à peine plus que le consensus). L’inflation sous-jacente (hors éléments volatils) est aussi en progression à 6,5% en variation annuelle. Le point haut pourrait seulement être atteint en début d’année prochaine, dans une borne comprise entre 13% et 18%. L’écart important au niveau des prévisions s’explique par la difficulté à l’heure actuelle de prévoir l’évolution de la dynamique des prix au-delà de deux ou trois mois. En France, l’INSEE a par exemple reconnu que le contexte macroéconomique est tellement volatil qu’une prévision au-delà de deux ou trois mois comporte une marge d’erreur inhabituellement élevée. C’est un problème pour les entreprises qui n’ont pas la visibilité économique nécessaire pour ajuster au plus près leur business plans pour 2023.
De l’autre côté de l’Atlantique, la situation est plus stable, heureusement. Les élections de mi-mandat qui auront lieu en novembre ne sont pas vraiment un enjeu. Il semble évident que le Parti Conservateur va les gagner (mais les Démocrates devraient limiter les pertes). L’attention se porte en revanche sur la prochaine réunion de la Réserve Fédérale américaine (Fed) qui aura lieu au début du mois prochain. Plusieurs membres du FOMC se sont exprimés la semaine dernière (James Bullard et Neel Kashkari entre autres). Il y a un consensus sur la nécessité d’augmenter encore fortement les taux (probablement de l’ordre de 75 points de base) pour lutter contre les pressions inflationnistes. Tous semblent s’accorder sur le fait que le processus en cours devrait encore perdurer au moins jusqu’au début de l’année prochaine. Par la suite, la banque centrale pourrait opérer une pause de politique monétaire afin de voir si l’inflation reflue suffisamment. Les derniers indicateurs économiques (comme le Beige Book publié par la banque centrale qui permet d’avoir une vision de la dynamique économique dans les principales régions des Etats-Unis) confirment que l’économie ralentit. En revanche, le risque de récession est lointain. Le marché du travail est résilient. Le marché de l’immobilier se dégonfle. A part dans quelques villes bien spécifiques (notamment en Californie et au Texas), on ne peut pas parler de krach du marché de l’immobilier. Cela reste toutefois un point à surveiller de près dans les mois à venir.

Sur le marché des changes, l’EUR/USD reste toujours dans une dynamique baissière marquée malgré des tentatives de rebond qui échouent systématiquement. En variation sur trois mois, la paire a reculé de 4,50%. Il y a quelques niveaux techniques importants à franchir avant d’avoir une accélération de la baisse (en particulier la zone de support située autour de 0,96). Mais ce n’est qu’une question de temps avant que cela ne survienne. La paire EUR/GBP continue d’évoluer dans la zone des 0,86-87 comme lors des quinze derniers jours. Nous sommes toujours haussiers sur la paire étant donné les risques auxquels fait face le Royaume-Uni. Un retour vers la parité est peu probable mais nous pourrions voir une hausse en direction de 0,90 dans les semaines à venir. Enfin, les pressions vendeuses sont toujours intactes sur le JPY. La Banque du Japon ne réussit pas à soutenir le yen en dépit d’interventions régulières sur le marché des changes. La paire EUR/JPY est en progression de 12% depuis le début de l’année. C’est face au dollar américain que l’effondrement est plus marqué toutefois (baisse du yen de 30% sur la même période !). C’est simple : intervenir seul sur le marché des changes est systématiquement un échec. C’est ce qu’on retient des tentatives passées. La même chose est en train de se produire en ce moment. La banque centrale japonaise gaspille ses réserves de change pour rien. Nous sommes haussiers sur la paire EUR/JPY, évidemment.

Les supports et résistances affichés ci-dessous indiquent respectivement les points bas et hauts au sein desquels les cours devraient évoluer dans le courant de la semaine.

 SUPPORTSHEBDORÉSISTANCES HEBDO
S2S1R1R2
EUR/USD0,93700,95470,99031,0100
EUR/GBP 0,83340,85120,90470,9120
EUR/CHF 0,94770,96000,99441,0090
EUR/CAD 1,31211,33001,36711,3855
EUR/JPY 140,68143,46149,02151,81

+33 (0)1 48 09 09 83

Les banques centrales font leur retour cette semaine. La Banque du Canada devrait augmenter le 26 octobre son taux directeur de 50 points de base à 3,75%. La fin du cycle de durcissement est certainement proche au Canada car le marché de l’immobilier montre des signes de fragilité inquiétants (la bulle a gonflé pendant plus de dix ans). En zone euro, l’inflation est toujours un casse-tête du point de vue de la politique monétaire. Nous nous attendons à ce que la Banque Centrale Européenne (BCE) augmente son taux directeur de 75 points de base et annonce d’autres hausses à venir (cela correspond au consensus des analystes). Est-ce que ce sera suffisant pour redonner du souffle à l’euro ? Nous en doutons. En outre, la BCE devrait amorcer le débat sur la réduction du bilan qui fait partie du processus de durcissement monétaire. Une décision finale ne devrait être prise qu’en décembre prochain toutefois. Il devrait y avoir également quelques échanges plus techniques afin d’encourager les banques commerciales à rembourser en avance les prêts consentis dans le cadre des opérations de refinancement à très long terme (TLTRO) dans des conditions ultra-favorables. C’est technique. Cela n’aura aucun effet notable sur le marché des devises.

Vous trouverez ci-dessous les publications et événements qui devraient avoir un impact majeur sur l’évolution du cours des devises.

JOURHEUREPAYSINDICATEURA QUOI S'ATTENDRE ?
25/1010:00Indice IFO du climat des affaires (Octobre)Faible hausse (consensus des analystes à 87,0 contre 84,3 en septembre)
16:00Confiance des consommateurs du Conference Board (Octobre)Baisse attendue à 106 contre 108 en septembre.
26/1016:00Réunion de la banque centrale Hausse du taux directeur à 3,75%.
27/1014:15Réunion de la banque centraleHausse du taux directeur de 50 points de base.
14:30PIB trimestriel pour le troisième trimestreConsensus à 2% contre -0,6% au deuxième trimestre.
28/1008:00Première estimation du PIB au troisième trimestreConsensus à 0,1%.
14:00Indice des prix à la consommation (Octobre)Baisse attendue à 9,4% en variation annuelle contre un pic à 10% en septembre.

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