Un démarrage en force

C’est un nouveau monde. Il y a seulement un an de cela, nous n’aurions jamais imaginé que deux des principales banques centrales mondiales puissent augmenter leur taux directeur de 75 points de base la même semaine. Ce fut pourtant le cas. La Banque du Canada (BoC) et la Banque Centrale Européenne (BCE) l’ont fait la semaine passée. Selon des informations du Wall Street Journal (qui est en général bien renseigné sur l’évolution de la politique monétaire américaine), la Réserve Fédérale américaine (Fed) devrait faire de même plus tard ce mois-ci. Malgré le cycle de durcissement monétaire qui a été enclenché au niveau mondial en décembre dernier (lorsque le Royaume-Uni a redressé ses taux), l’inflation reste désespérément élevée. En zone euro, la BCE table sur une inflation à 8,1% cette année selon sa dernière prévision publiée jeudi dernier. Au Royaume-Uni, le gouvernement prévoit que le pic d’inflation pourrait être entre 13% et 18%. C’est une borne large qui traduit la difficulté à prévoir avec précision l’évolution de la conjoncture dans un climat économique troublé (crise de l’énergie, guerre en Ukraine, pandémie etc.). Lors d’une intervention sur BFM Business jeudi dernier, Julien Pouget, chef du département de la conjoncture de l’INSEE, a reconnu qu’il est difficile de faire des prévisions à plus de trois mois. Pour les entreprises qui sont généralement en train d’ajuster leurs business plans en cette période, c’est un vrai casse-tête d’anticiper l’évolution des ventes, de l’inflation et de la croissance dans les trimestres à venir. Beaucoup prévoient toutefois que ce sera en 2023 que les principales conséquences de la crise actuelle se feront sentir. C’est également notre opinion. Cela va se traduire par des baisses dans les perspectives d’investissement et dans les recrutements. Faire des économies va devenir la priorité.
En termes de politique monétaire, le cycle de durcissement devrait continuer dans la plupart des pays à court terme. La BCE a indiqué qu’il y aurait au moins encore trois hausses de taux au maximum. Cela signifie que les taux d’intérêt pourraient augmenter de nouveau en octobre, en décembre et en février prochains avant qu’une pause soit mise en œuvre. C’est crédible. C’est seulement à partir du début de l’année prochaine que le risque de récession souvent évoqué en zone euro pourrait se matérialiser. La survenue de la récession dépendra en grande partie de comment va se dérouler l’automne et l’hiver sur le plan énergétique. Tout porte à croire que les écogestes prônés par le gouvernement (couper le wifi par exemple) ne seront pas suffisants et qu’il faudra passer par un rationnement de l’énergie. Au Canada, la BoC a également confirmé la semaine dernière que d’autres hausses de taux sont à venir. Le taux directeur se situe actuellement à 3,25%. C’est au-dessus du taux neutre qui se situe entre 2 et 3%. Le taux neutre est un concept théorique qui est mis en avant par les banques centrales et qui renvoie à une situation où le taux directeur serait sans effet sur une économie en équilibre. Tous les banquiers centraux le mentionnent régulièrement (y compris la présidente de la BCE Christine Lagarde jeudi dernier). Mais c’est un concept très flou qui ne veut pas dire grand-chose.
Au Royaume-Uni, un nouveau Premier ministre, Liz Truss, a pris les rênes du pays. Sa première action fut d’annoncer un plan anti-inflation massif (dont le montant exact n’est pas communiqué). Il inclut de nombreuses mesures de soutien à destination des ménages et des entreprises énergétiques : limite sur les factures d’énergie à 2500 GBP par mois pendant deux ans, mécanisme de fourniture de liquidité aux entreprises énergétiques pour un montant de 40 milliards GBP, déploiement massif d’énergie renouvelable ou encore engagement à atteindre la neutralité carbone en 2050. La piste d’une taxation des superprofits (qui est mise en avant en Allemagne et abondamment évoquée en France) est exclue à ce stade. Le gouvernement estime que grâce à ces différentes mesures le pic d’inflation pourrait être 4% voire 5% inférieur aux estimations initiales. Les implications en termes de politique monétaire sont incertaines. La perspective d’une baisse à venir de l’inflation n’implique pas pour autant que la Banque d’Angleterre (BoE) va ralentir dans l’immédiat son processus de relèvement des taux. Au contraire, elle pourrait décider d’agir fortement à court terme pour ensuite pouvoir baisser les taux lorsque la récession arrivera (c’est son scénario central) et que l’inflation sera sous contrôle. C’est d’ailleurs ce que pensent les opérateurs. Le marché monétaire anticipe qu’il existe une probabilité de 85% que la BoE augmente son taux directeur de 75 points de base cette semaine.

Sur le marché des changes, l’euro a rebondi face à la quasi-totalité de ses contreparties principales (USD, JPY, CAD, GBP en particulier). La progression la plus importante est face au yen japonais qui ne cesse de s’affaiblir (hausse de l’EUR/JPY de plus de 2% en variation hebdomadaire). Cela va certainement renforcer les rumeurs d’intervention de la part de la Banque du Japon (BoJ) sur le marché des changes pour soutenir le yen. Un yen faible est un problème majeur pour l’archipel nippon car cela renchérit le coût des importations (en particulier pour l’énergie) et donc alimente les tensions inflationnistes. Nous doutons toutefois qu’une intervention survienne à court terme. Cela fait depuis le printemps que les cambistes en parlent. En outre, le rebond de l’euro ne sera certainement pas durable de notre point de vue. Le panorama économique est trop incertain en zone euro pour que cela se produise. Dans la plupart des cas, nous avons assisté au cours des dernières séances à un rebond technique de la monnaie unique qui a été alimenté en partie par la hausse des taux de la BCE. Nous sommes par exemple toujours baissiers sur la paire EUR/USD avec un premier objectif à 0,9784 (c’est notre niveau de support hebdomadaire).

Les supports et résistances affichés ci-dessous indiquent respectivement les points bas et hauts au sein desquels les cours devraient évoluer dans le courant de la semaine.

 SUPPORTSHEBDORÉSISTANCES HEBDO
S2S1R1R2
EUR/USD0,95640,97841,02241,0444
EUR/GBP 0,83520,85080,87410,8780
EUR/CHF 0,94660,95920,99701,0100
EUR/CAD 1,26981,28911,32791,3473
EUR/JPY 136,32140,00146,03148,39

+33 (0)1 48 09 09 83

Outre la réunion de la BoE que nous avons déjà mentionnée, l’actualité de cette semaine tournera de nouveau autour du thème de l’inflation. Ce n’est une surprise pour personne. Notre conviction chez Mondial Change, c’est que le pic d’inflation a déjà été atteint aux Etats-Unis (ce n’est pas le cas en France en revanche). Nous aurons certainement confirmation de cela avec les derniers chiffres portant sur les prix à la consommation (13/09) et les prix à la production (14/09) pour le mois d’août. Cela ne signifie pas que la Fed va ralentir son cycle de durcissement monétaire pour autant. Le niveau d’inflation est trop élevé pour qu’il y ait un relâchement quelconque au niveau de la hausse des taux. En outre, à part un essoufflement marqué du secteur de l’immobilier, l’économie américaine se porte globalement bien. Cela offre une latitude certaine à la Fed pour continuer d’augmenter le loyer de l’argent aux Etats-Unis. La publication de l’indice ZEW en Allemagne (13/09) est intéressante pour les économistes. En revanche, c’est rarement une statistique qui a un effet sur le marché des changes. Nous n’y ferons pas trop attention.

Vous trouverez ci-dessous les publications et événements qui devraient avoir un impact majeur sur l’évolution du cours des devises.

JOURHEUREPAYSINDICATEURA QUOI S'ATTENDRE ?
13/0908:00Evolution du nombre de demandeurs d’emploi (Août)Précédent : -10,5K en juillet
11:00Indice ZEW du sentiment économique (Septembre)Consensus des analystes à -53,8 contre -55,3 précédemment.
14:30Première estimation de l’indice des prix à la consommation (Août) Précédent : 8,5% sur un an. Le consensus table sur une nouvelle baisse ce qui confirmerait que le pic d’inflation est déjà dépassé aux Etats-Unis.
14/0914:30Première estimation de l’indice des prix à la production (Août)Rebond attendu à 0,2% en variation mensuelle contre -0,5% en juillet (susceptible d’être révisé).
15/0914:00Réunion de la banque centraleEn se basant sur les attentes du marché, une hausse des taux de 75 points de base est anticipée.
16/0911:00Nouvelle estimation de l’indice des prix à la consommation (Août)Confirmation attendue à un niveau record de 9,1% sur un an.

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