Un nouveau monde

Les indicateurs économiques qui ont été publiés au cours de la semaine dernière en zone euro renvoient à un monde qui n’existe plus. La zone euro a enregistré une croissance très honorable de 4,6% en variation annuelle au quatrième trimestre 2021. En Allemagne, la production industrielle a fortement augmenté en janvier à 1,8% en variation annuelle. La production était en hausse dans tous les secteurs d’activité, notamment dans la construction qui a rebondi de plus de 10%. Mais c’était avant que la guerre en Ukraine ne vienne mettre un terme à la dynamique positive.

Comme l’a rappelé la Banque Centrale Européenne (BCE) jeudi dernier, le panorama économique est désormais totalement différent. L’inflation est au cœur des préoccupations. Elle pourrait augmenter considérablement dans les mois à venir à cause de la hausse fulgurante du prix des matières premières (énergie et produits agricoles). Cela a incité la BCE à adopter un ton hawkish – en faveur d’une normalisation rapide de la politique monétaire. Le calendrier de fin du QE (pour Quantitative Easing ou programme d’assouplissement quantitatif en français) a été accéléré au troisième trimestre de cette année, contre le quatrième trimestre initialement. Le marché monétaire a ajusté ses anticipations de hausse du taux directeur dans la foulée. Désormais, les cambistes prévoient une première hausse des taux de 25 points de base en septembre prochain. Comme nous l’indiquions il y a quelques semaines de cela, ces anticipations sont très fluctuantes en fonction des discours des banquiers centraux et des dernières statistiques. Elles sont néanmoins importantes car elles exercent une influence certaine sur l’évolution des taux de change, en particulier de l’EUR/USD dans le cas présent. Des analystes estiment que la BCE souhaite normaliser rapidement sa politique monétaire pour soutenir l’euro qui a fortement baissé depuis l’enclenchement de la guerre en Ukraine. Un euro faible a pour conséquence de faire croître l’inflation importée. Cette thèse n’est pas aberrante et explique peut-être au moins en partie le positionnement de la BCE jeudi dernier.

Beaucoup d’autres banques centrales sont sur la même longueur d’ondes. La banque centrale polonaise a porté son taux directeur principal à 3,50% la semaine passée – soit une augmentation de 75 points de base en une seule fois. C’est plus que ce qu’attendait le consensus. La volonté de soutenir la monnaie polonaise, le zloty, qui s’est fortement déprécié ces deux dernières semaines, ainsi que la nécessité de contrer les pressions inflationnistes ont été les deux facteurs évoqués pour expliquer ce durcissement brutal du loyer de l’argent. Le gouverneur de la banque centrale, Adam Glapinski, a clairement indiqué que d’autres hausses de taux sont à venir. En outre, les interventions directes sur les changes (achats de zlotys et ventes d’euros et de dollars) vont se poursuivre. L’ère des taux ultra-bas, qui prévalait quasiment sans discontinuer depuis la crise financière de 2008, est bel et bien terminée.

Sur le marché des changes, la volatilité s’est un peu réduite en fin de semaine dernière. Beaucoup de paires tentent une stabilisation, à l’instar de l’EUR/USD. La paire principale du Forex pourrait poursuivre à très court terme sa consolidation. Dans les semaines à venir, nous voyons en revanche un maintien de la volatilité dans une borne assez large comprise entre 1,0805 et 1,1190. Les risques de chute sous les 1,0805 sont élevés en cas de hausse du risque géopolitique (en lien avec l’Ukraine). A plus long terme, il faut bien reconnaître que nous manquons de visibilité. Commerzbank a indiqué dans une note publiée la semaine dernière prévoir que l’EUR/USD va finir l’année autour des 1,16. Faire des prévisions sur les taux de change à un horizon si lointain s’avère souvent hasardeux. Nous préférons nous abstenir.

Les supports et résistances affichés ci-dessous indiquent respectivement les points bas et hauts au sein desquels les cours devraient évoluer dans le courant de la semaine.

 SUPPORTSHEBDORÉSISTANCES HEBDO
S2S1R1R2
EUR/USD1,06581,08051,11901,1289
EUR/GBP 0,81120,82550,85790,8812
EUR/CHF 0,9831,00361,04031,0499
EUR/CAD 1,35381,37871,43021,4479
EUR/JPY 122,48125,5130,03131,69

+33 (0)1 48 09 09 83

La situation en Ukraine sera toujours un point d’attention majeur cette semaine car une éventuelle dégradation sur le plan militaire ou de nouvelles sanctions des Occidentaux à l’égard de la Russie peuvent provoquer d’importants regains de volatilité sur les changes. La réunion de la Réserve Fédérale américaine (Fed) sera l’autre facteur possible de volatilité. L’enjeu est toutefois faible. Il y a moins de dix jours, le président de la Fed, J. Powell, avait indiqué qu’une hausse du taux directeur de 25 points de base est quasiment acquise. Entre-temps, l’indice des prix à la consommation aux Etats-Unis a atteint un point haut depuis 1982, à 7,9% en variation annuelle. Il ne fait pas de doutes que la Fed doit agir. En revanche, il existe une incertitude élevée concernant le rythme d’appréciation des taux par la suite. Il n’est pas certain que J. Powell soit très clair à ce propos. La guerre en Ukraine soulève beaucoup d’inconnues. Les banques centrales doivent, au maximum, garder une certaine flexibilité pour ajuster au mieux la politique monétaire.

Vous trouverez ci-dessous les publications et événements qui devraient avoir un impact majeur sur l’évolution du cours des devises.

JOURHEUREPAYSINDICATEURA QUOI S'ATTENDRE ?
15/0311:00Indice ZEW du sentiment économique (Mars)Progression à 55,0 contre 54,3 précédemment.
16/0319:00Communiqué du FOMCMise à jour des projections économiques et hausse probable du taux directeur de 25 points de base.
19:30Conférence de presse de J. PowellJ. Powell sera confronté à un exercice difficile : convaincre le marché de son intention de combattre l’inflation élevée dans un contexte macroéconomique incertain du fait de la guerre
17/0313:00Réunion de la banque centraleStatu quo de politique monétaire.
13:30Indice manufacturier de la Fed de Philadelphie (Mars)Consensus à 18,0 contre 16,0 précédemment.

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