Ce ne sera pas de tout repos

Les banques centrales continuent d’occuper le terrain. En début de semaine dernière, lors de son audition devant le Parlement Européen à Strasbourg, la présidente de la Banque Centrale Européenne (BCE), Christine Lagarde, a confirmé qu’un mécanisme anti-fragmentation serait dévoilé prochainement. Depuis que la banque centrale a indiqué sa volonté de durcir sa politique monétaire pour combattre l’inflation persistante, le coût d’emprunt des pays de la zone euro n’a cessé d’augmenter. Il s’agit en partie d’une normalisation (la période de taux négatifs qui a duré presque dix ans est une anomalie dans l’histoire économique). Cela reflète aussi pour certains pays des craintes réelles concernant la stabilité financière (c’est le cas de l’Italie). Ce mécanisme pourrait être présenté dès la prochaine réunion du 21 juillet de la BCE et viser à limiter l’écart de coût d’emprunt entre les pays jugés sûrs (l’Allemagne, en particulier) et les pays plus vulnérables (l’Italie surtout mais la Grèce et l’Espagne sont aussi concernées). D’autres membres du Conseil des gouverneurs ont également assuré le service après-vente de ce mécanisme au cours des derniers jours (par exemple Olli Rehn, chef de la banque centrale de Finlande). Contrairement à 2021 lorsque la BCE avait un peu tardé à réagir, elle prend cette fois-ci les devants afin de s’assurer qu’une crise de la dette souveraine en zone euro ne vienne pas perturber la fragile reprise post-Covid. Nous sommes confiants chez Mondial Change sur le fait que ce nouvel outil sera efficace pour endiguer les risques de panique sur le marché obligataire souverain.

De l’autre côté de l’Atlantique, le président de la Réserve Fédérale américaine (Fed), Jerome Powell, a reconnu lors de son audition devant le Congrès que le pic d’inflation n’est certainement pas encore atteint (c’était un sujet ces dernières semaines dans les salles de marché). Il a ajouté que l’économie américaine est suffisamment « solide et bien placée pour faire face à un resserrement monétaire ». Certains membres du FOMC (l’organisme qui gère la politique de taux d’intérêt aux Etats-Unis) plaident pour une démarche très agressive (c’est le cas du président de la Réserve Fédérale de Saint-Louis, James B. Bullard, par exemple). Mais les signaux faibles s’accumulent faisant craindre que l’économie ne soit pas en si bonne position que cela, ce qui pourrait limiter la marge de manœuvre de la banque centrale pour augmenter les taux. Les indicateurs publiés au cours des deux dernières semaines montrent un net décrochage du secteur de l’immobilier en mai (dernières statistiques disponibles). Trois facteurs principaux expliquent cela : la hausse des taux hypothécaires (le taux fixe à 30 ans qui sert de référence est désormais au-dessus des 6%), la flambée des prix de l’immobilier et la baisse du pouvoir d’achat des ménages américains à cause de l’inflation. On a coutume de dire que l’immobilier est l’un des moteurs essentiels du cycle économique et des affaires aux Etats-Unis. C’est vrai. Si le ralentissement dans le secteur se poursuit dans les mois à venir (ce qui est vraisemblable), il faut s’attendre à une très faible croissance du PIB au troisième trimestre. Le risque de récession n’est pas immédiat. Pour l’instant, la dernière enquête auprès des prévisionnistes professionnels pour les Etats-Unis montre une probabilité de récession de 20%. Mais le risque que cela survienne fin 2022 ou en 2023 s’accroît. En cas de récession aux Etats-Unis, le dollar américain sera incontestablement le grand gagnant selon nous (du fait de son statut de valeur refuge et parce que les excédents des autres pays vont se recycler aux Etats-Unis en période de crise, ce qui soutient le taux de change du billet vert). Nous serons fixés d’ici quelques mois.

Enfin, le processus de durcissement monétaire se poursuit dans le reste du monde. La semaine dernière, ce fut au tour de la banque centrale de Norvège de prendre par surprise le marché en décidant une hausse de 50 points de base de son taux directeur alors qu’elle avait communiqué jusqu’à présent sur une progression de seulement 25 points de base. Face à une inflation qui devient incontrôlable, les banques centrales n’ont pas d’autre choix que d’agir plus fortement et plus rapidement. Nous pensons que beaucoup de banques centrales pourraient décider d’intervenir en urgence avant leur prochaine réunion afin d’envoyer un message clair au marché (la probabilité est forte que la Banque d’Angleterre annonce au moins une hausse de son taux de 25 points de base, en urgence, avant sa prochaine réunion prévue le 4 août).

Sur le marché des changes, le yen faible pose de plus en plus de problèmes aux autorités nippones. Depuis le début de l’année, la monnaie japonaise a diminué de 8,50% face à l’euro et de 17% face au dollar américain. C’est massif. Dans une interview donnée à Bloomberg la semaine passée, l’ancien responsable des changes au ministère des Finances du Japon, Takehiko Nakao, a laissé entendre qu’une intervention directe sur le FX par la Banque du Japon (BoJ) ne peut pas être exclue. Cela fait plusieurs semaines que cette rumeur circule chez les cambistes. La dépréciation de la devise nippone est unanimement perçue comme négative car elle contribue à la hausse de l’inflation importée. En outre, le niveau actuel du yen (autour des 134 face au dollar et autour des 142 face à l’euro) n’est semble-t-il pas un élément de soutien pour les entreprises exportatrices (à ce niveau, l’effet positif visant à stimuler les exportations est faible). Il est probable qu’une intervention sur le marché Forex survienne dans les mois à venir. Mais nous doutons qu’elle soit couronnée de succès. Dans le contexte actuel, seule une hausse du taux directeur (qui n’est pas sur la table pour le moment) pourrait durablement soutenir la monnaie de l’archipel. En ce qui concerne l’EUR/USD, la paire a évolué une grande partie de la semaine passée autour de la zone pivot des 1,05. L’analyse technique confirme le biais baissier à moyen terme (il n’y a pas d’éléments macroéconomiques permettant un soutien de l’euro non plus). L’objectif que nous nous fixons est autour des 1,02-1,03. Cette zone de prix pourrait être atteinte dès cet été.

Les supports et résistances affichés ci-dessous indiquent respectivement les points bas et hauts au sein desquels les cours devraient évoluer dans le courant de la semaine.

 SUPPORTSHEBDORÉSISTANCES HEBDO
S2S1R1R2
EUR/USD1,02391,04011,08111,0990
EUR/GBP 0,83300,84200,86270,8670
EUR/CHF 0,98300,99891,02841,0432
EUR/CAD 1,33341,34191,37851,3900
EUR/JPY 139,18140,93143,76145,66

+33 (0)1 48 09 09 83

Cette semaine sera plutôt calme au niveau des statistiques. La deuxième estimation du PIB américain au premier trimestre ne devrait pas diverger de la première lecture. Le marché des changes n’y prêtera pas attention. Il est évident que la confiance des consommateurs américains (estimation du Conference Board publiée mardi pour le mois de juin) va continuer de chuter dans les mois à venir. Nous pensons que les Américains vont consommer sans se restreindre pendant l’été (c’est le premier été sans Covid depuis l’été 2019 !). Mais à la rentrée de septembre, ils devraient être plus vigilants concernant leurs dépenses. Le pire reste à venir concernant l’économie américaine.

Vous trouverez ci-dessous les publications et événements qui devraient avoir un impact majeur sur l’évolution du cours des devises.

JOURHEUREPAYSINDICATEURA QUOI S'ATTENDRE ?
28/0616:00Confiance des consommateurs du Conference Board (Juin)Nouvelle baisse attendue à 104 contre 106,4 en mai. L’inflation fait des ravages.
29/0614:30PIB trimestriel au T1En première estimation, le PIB était ressorti en territoire négatif. Cela devrait être de nouveau confirmé.
30/0609:55Evolution du taux de chômage (Juin) Nouvelle décrue attendue à -15k contre -4k en mai.

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