Découplage

i vous avez fait le pont de l’Ascension, vous n’avez pas raté grand-chose sur le marché des changes. Les volumes étaient faibles – ce qui est normal en cette période. Nous avons toutefois une mauvaise nouvelle à partager : les interventions de la Banque du Japon pour inverser la tendance de fond baissière sur le yen sont loin d’être un succès. Le yen faible risque d’être la norme pour le reste de l’année.

Le mois de mai est traditionnellement calme sur les marchés financiers. La semaine qui vient de s’écouler ne déroge pas à la règle. Il n’y avait quasiment aucune statistique importante. La seule réunion de banque centrale à mentionner est celle de la Banque de Réserve d’Australie. Sans surprise, c’est le statu quo monétaire qui l’a emporté. Le communiqué publié dans la foulée de la réunion a soufflé le chaud et le froid, laissant la porte ouverte aussi bien à une baisse des taux qu’à une hausse des taux. L’Australie fait partie des quelques économies développées qui ont un vrai problème avec l’inflation domestique, comme les États-Unis.
Aux États-Unis justement, il n’y a eu qu’une statistique importante : l’enquête de la Fed de New York appelée Survey of Consumer Expectations qui a été réalisée en février. Elle a confirmé qu’il n’y a pas de répit attendu sur le front des prix immobiliers et des loyers par les Américains sondés. C’est une mauvaise nouvelle puisque l’immobilier est un des pans de l’économie où l’inflation est problématique. De notre point de vue, au regard de la dynamique d’inflation, une baisse des taux de l’autre côté de l’Atlantique ne peut en aucune façon survenir en juin. Même si les prochains indicateurs vont dans le sens d’une atténuation de l’inflation – ce qui n’est en rien certain – le FOMC n’aura pas suffisamment de recul pour savoir si la baisse constatée est conjoncturelle ou structurelle. Kashkari, membre du FOMC, a parfaitement bien résumé la situation lors d’une intervention mardi dernier : « Le scénario le plus probable est que nous maintenions les taux en place pendant une période de temps étendue. Une hausse de taux n’est pas le plus probable mais nous ne pouvons pas l’exclure. Le rapport sur l’emploi vendredi est plus faible qu’attendu mais il n’est pas faible. Nous devrons avoir plusieurs publications d’inflation pour avoir confiance sur la baisse de taux. Si nous n’atteignons pas 2% d’inflation, cela impactera notre crédibilité ». Le message est limpide : il faut des taux élevés sur la durée.
Du point de vue du marché des changes, cela signifie qu’il va y avoir à partir du mois de juin un découplage de taux qui va s’accentuer entre les deux bords de l’Atlantique. C’est un scénario qui est déjà en partie intégré dans les prix offerts sur le marché. Dans l’absolu, le maintien de taux élevés aux États-Unis est un facteur de soutien structurel du dollar. Les flux de capitaux mondiaux à la recherche de rendements élevés et relativement sûrs vont plutôt aller aux États-Unis qu’ailleurs. C’est ce qui explique, au passage, la très bonne performance des indices boursiers américains depuis le début d’année. Pour l’EUR/USD, le découplage devrait se traduire par une baisse plus prononcée de l’euro. Nous visons 1,05 qui nous paraît être un niveau en ligne avec les fondamentaux de la zone euro également. Même si la croissance est loin d’être soutenue sur le Vieux-Continent, les signaux s’accumulent en faveur d’une lente reprise. Cela ne va toutefois pas permettre de rattraper le recul européen face aux États-Unis. Une donnée pour faire peur : le PIB de la France se situe désormais entre celui du Texas et celui de la Californie. Cela montre à quel point le décrochage européen est important et accentué depuis les années 2000…

Le point technique

Sur le marché des changes, les mouvements étaient limités dans un contexte de volumes faibles – ce qui est normal en cette période de l’année. Il y a toutefois une mauvaise nouvelle. La Banque du Japon (BoJ) a certainement échoué à inverser la tendance de fond baissière sur le yen. Les deux dernières interventions de la part de Tokyo sur le marché des changes n’ont eu des effets positifs qu’à très court terme. C’était prévisible. Pour que le Japon réussisse, il a besoin a minima que le Trésor américain intervienne en même temps. Ce n’est pas d’actualité. La secrétaire au Trésor américain, Yellen, a fait part publiquement de sa surprise concernant les mouvements erratiques du yen japonais. Cela signifie en langage diplomatique que Washington n’apprécie pas les interventions de la BoJ sur le FX. Quant bien même les États-Unis décideraient d’intervenir de manière coordonnée, le succès n’est pas garanti. On sait que les interventions sur le marché des changes sont couronnées de succès lorsqu’il y a aussi une politique monétaire alignée avec les objectifs recherchés de l’intervention. Comparativement, la BoJ maintient toujours une politique monétaire ultra-accommodante qui n’est pas cohérente avec une devise forte. Nous continuons de penser que le yen faible est là pour rester.

Les supports et résistances affichés ci-dessous indiquent respectivement les points bas et hauts au sein desquels les cours devraient évoluer dans le courant de la semaine.

 SupportshebdoRésistanceshebdo
S2S1R1R2
EUR/USD1,05981,06101,08541,0912
EUR/GBP 0,83880,84120,86450,8699
EUR/CHF 0,95550,96120,98220,9889
EUR/CAD 1,44551,45901,48091,4855
EUR/JPY 163,55164,11168,01169,11

Les annonces à suivre

C’est encore une semaine calme qui nous attend, avec certainement peu de volumes et des paires qui évoluent, pour la plupart, en situation de range. L’inflation aux États-Unis en avril sera publiée. Les prix à la consommation en mars avaient fortement surpris le marché à la hausse. Un repli de l’inflation est nécessaire désormais pour envisager une baisse de taux après l’été. Mais soyons objectifs, peu importe le chiffre qui sera publié, cela ne va pas changer la direction de la politique monétaire américaine à court terme. Elle est en mode pilotage automatique au moins jusqu’à la rentrée de septembre.

Vous trouverez ci-dessous les publications et événements qui devraient avoir un impact majeur sur l’évolution du cours des devises.

JourHeurePaysIndicateurÀ quoi s'attendre ?
Le 14/05/202414:30USAPrix à la production (Avril)Précédent à 0,2% sur un mois.
Le 15/05/202414:30USAPrix à la consommation (Avril)Précédent à 3,5% sur un an.

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